Un dernier regard

Bonjour,

C'est ma première participation, ce qui provoque chez moi enthousiasme et peur, un mélange curieux.
Quoi qu'il en soit, bonne lecture.


       Je ne pouvais réprimer le tremblement de mes mains couverte de sang, pourtant ce n’était pas le mien. J'aurais préféré que ce soit le mien. J'enroulais le bandage une dernière fois autour de sa cuisse, me débrouillant au mieux pour contourner le morceau de métal tranchant de la coque qui s'y était logé. J’espérais réduire l’hémorragie, mais les bandages viraient déjà au cramoisie. Sa jambe était fracassée et ses os brisés, pourtant Karl ne grimaçait même pas derrière le masque à oxygène qui lui couvrait le visage. L’explosion l’avait atteint sur tout son côté droit, son bras gisait au sol animé de spasme ponctuel.

La coque vibra brutalement, un autre secteur venait d'être engloutie. Une lourde porte se referma derrière nous, mais il n’y avait plus aucun air à retenir. Mon cœur tambouriné contre ma poitrine alors que j'ajustais mon masque à oxygène. Nous devions continuer, dans quelques minutes ce vaisseau spatial n’existera plus.

Karl me repoussa alors que je tentais de passer mes mains sous son corps, son regard exempt de tristesse, débordait d’une acceptation funeste que je refusais. Je ne l'abandonnerais pas et il le savait.

Je le soulevais en l’attrapant sous les jambes et le dos puis couru aussi vite que possible. Je filais dans les couloirs grisâtre, manquant de perdre l’équilibre à plusieurs reprises, à chaque secousse qui ébranlait un peu plus l’intégrité du vaisseau. Sans air, impossible de se parler et j’en mourrais d’envie.

Après une course effrénée nous arrivions dans le grand hall d’accueil. Les navettes de d'évacuation nord n’étaient plus très loin. Une grande baie vitrée prenant la place de tout un mur, offrait une vue imprenable sur l’immense vaisseau. Je restais sidéré un moment malgré moi. Un astéroïde s'était écrasé sur la coque, mais il était vivant. Et à présent il se rependait, prenant la forme d’une substance noir visqueuse et granuleuse, broyant et dévorant le bâtiment comme si s’était du vulgaire papier.

Ma mâchoire se contractée. C’était ma faute si nous étions dans ce coin reculé de la galaxie, c’était moi qui devrais en payer les conséquences, pas toi. La culpabilité savait être un moteur puissant qui propulsa mes muscles endoloris vers la sortie. Je devais le sauver.

Encore des couloirs à n’en plus finir à l’éclairage vacillant et aux portes condamnées. Des années que nous explorions les confins de la voie lactée, ce n’était pas un astéroïde sentient qui nous tuerai. Nous avions traversé pire. J’essayais de me rassurer en me berçant d’illusion alors que je sentais grandir une angoisse qui me tordait l’estomac.

Enfin, après un dernier tournant, au fond du couloir, la salle des navettes de secours. Plus qu’une centaine de mètre. À mi-chemin je sentis la main de Karl agripper ma manche mais je n’y prêtai pas attention. Beaucoup de navette étaient parties, mais il en restait encore trop. Beaucoup moururent ce jour-là.

Je tapais du coude sur le bouton du sas qui mit bien trop de temps à s’ouvrir et la pressurisation en demanda tout autant. Enfin nous pûmes pénétrer dans la navette. Je remarquai que Karl tenait toujours ma manche quand je le déposé dans le siège. Je l’aidai à retirer son masque et me débarrassais du mien en asseyant aux commandes. J’allumais les moteurs et pris les manettes de vol et enfin nous fîmes expulsées dans l’espace. Je poussais les moteurs à fond essayant de mettre autre de distance que possible entre nous et cette monstruosité. Elle finirait bientôt d’engloutir son repas et je doutais qu’elle soit rassasiée.

Je fis un sursaut alors que Karl attrapa ma main et me força à le regarder.

“Tu peux t’arrêter maintenant.” Dit-il d’une voix faible et sereine qui me glaça les entrailles. “Merci d'avoir d’essayé.”

Je n’avais jamais été douée pour les adieux mais Karl savait quand les choses touchaient à leur fin. Ses doigts caressaient ma joue et m’attiraient délicatement vers lui. J’enroulais mes doigts autour de sa main, des larmes remplissaient nos yeux.  

“Ne meurt pas avec moi. Vie.”

Nos bouches se joignaient sur ces derniers mots, nos lèvres s’écrasaient l’une contre l’autre, nos doigts se blottissait contre nos peaux. Ce baiser avait le goût salé de nos larmes qui glissaient sur nos visages en même temps que les doigts de Karl qui lâchaient finalement prise.

J'ai bien aimé ton texte. J'ai lu ça comme un extrait d'aventure trépidant. Au final, la scène sur la consigne est courte, mais elle fonctionne très bien.

Merci pour ton retour et ton temps.

Hello, trop cool, un passage de SF, j'adore ça ! Le fait que la scène tire en longueur m'a donné une sensation de distorsion du temps, celle qui peut frapper quand la mort est là.
Merci pour le partage

Merci pour ta lecture.

Hello ! Bravo pour ton texte ! j'aime bcp ta narration, je trouve que tu as une belle plume.

J'/je : attention aux "je" qui s'enchaînent et qui peuvent sonner redondant.

j’en mourrais d’envie.
Après une course effrénée nous arrivions : un dialogue aurait permis de faire une transition et de mettre encore plus en valeur la narration.

pas toi. : je trouve cette intervention un peu surprenante, je trouve que ça ne va pas avec le reste du texte, ou alors ça pourrait être mieux amené.

Beaucoup moururent ce jour-là. : tu nous sors de la scène avec ce genre de réflexion.

J’allumais les moteurs et pris les manettes de vol et enfin nous fîmes expulsées dans l’espace. : pas très épique ce passage malheureusement, je pense que ça manque un peu de drama, de détails et de phrases courtes.

Je fis un sursaut = je sursautai

Merci pour ta participation !