Trop de Nutella tue le Nutella - Atelier 20/03/22

(J'ai totalement précipité la fin par manque de temps, désolée ^^')


Robin referma son ordinateur portable avec un grognement désabusé, et s’étira sur sa chaise. Cela faisait plus de deux heures qu’il travaillait sur son exposé de SVT, et il commençait franchement à saturer. Il attrapa son téléphone et pianota à toute vitesse.
« Partie 1 finie, j’en peux pluuuuuuus ! Je fais une pause. »
Son amie Mélanie lui répondit presque aussitôt.
« P2 presque finie aussi, je reprendrai demain. »
Bien évidemment, aucune réaction de la part de Mathilde, qui n’avait toujours pas commencé à s’y intéresser. Quel boulet, celle-là… songea Robin, énervé. Tu paries combien qu’on va devoir tout se taper tous seuls, Mél et moi… Il secoua la tête et se leva tout en enlevant les boules quies de ses oreilles. Il avait du mal à les supporter, mais difficile de se concentrer avec sa petite sœur et ses amis qui mettaient le bazar dans la chambre d’à côté. J’ai besoin de grignoter quelque chose. Il quitta sa chambre et s’engagea dans le couloir tapissé de photos de famille. En traversant le salon pour atteindre la cuisine, il avisa ses parents devant la télévision.
« Ça va, mon grand ? lança son père.
- Mouais… Juste envie de traiter certaines personnes de tous les noms, mais à part ça, tout roule.
- Ne mange pas trop, c’est déjà tard ! intervint sa mère. Et évite le chocolat, s’il te plait. Pense à ton foie, un peu. »
Il se mordit la langue et se contenta d’acquiescer vaguement. Dans son état de fatigue et d’agacement, il se faisait justement une joie de se réconforter avec son meilleur ami, Nutella. Mais après tout, ses parents étaient dos à la cuisine. Ils ne le verraient pas.
Il se glissa derrière le plan de travail, souleva l’un des tabourets pour ne pas faire de bruit et le reposa tout doucement sur le sol, devant les placards en hauteur. Pour éviter que sa cadette, encore plus gourmande que lui, ne finisse le pot avant qu’il n’ait eu le temps de se servir, il l’avait stratégiquement rangé sur la plus haute étagère, hors de sa portée même si elle montait sur une chaise.
Ce qui n’était pas son cas, à lui. Il grimpa, saisit la poignée du placard et tira, puis jura à mi-voix. Il avait mal placé le tabouret, et son propre corps le gênait pour ouvrir la porte en grand. Trop la flemme de redescendre. Il se pencha sur le côté, sentant le siège vaciller sous ses pieds. Franchement, ça passe. Ça paaaaahh ! Il bascula, battit vainement des bras…
… et sa tête heurta le coin du plan de travail avec un bruit sourd.

Lorsqu’il rouvrit les yeux, ses paupières papillonnèrent plusieurs fois, et il les frotta vigoureusement. Il détestait cette sensation. Manque de magnésium ! se serait écriée sa mère, avant de lui brandir une boite de compléments alimentaires sous le nez. En parlant d’elle… Où était-elle ? Où était-il ? Il ne reconnaissait pas l’endroit. Une grande prairie verdoyante, parsemée de fleurs des champs. Ce paysage lui rappela les fois où il allait à la campagne avec ses parents, quand il était enfant.
À part qu’il n’y était plus retourné depuis presque dix ans. Et qu’autant qu’il s’en souvienne, il était à la maison quelques minutes plus tôt. Les détails lui revinrent en mémoire : l’exposé, ses parents, le Nutella… Le basculement. Oh merde, j’ai dû m’assommer en tombant, et du coup je suis en train de rêver. Pourquoi je rêve de ça, d’ailleurs ? Ils m’ont toujours saoulé, les séjours à la campagne…
« Bonjour ! » fit alors une voix douce.
Il sursauta et se retourna. Une petite dame qui paraissait très sympathique lui souriait gentiment.
« Tout va bien. Comment vous sentez-vous ?
- Euh… Bonjour… »
Bizarre de dire que tout va bien avant de demander comment on se sent réellement.
« Ça va. J’espère que je vais pas tarder à me réveiller, je dois retourner bosser sur mon exposé.
- Ah. Hum. Oui, d’accord. »
La bienveillance de la femme se teinta de pitié.
« Je suis désolée, mon garçon. Tout va bien, d’accord ? »
Hein ?
« Pourquoi vous êtes désolée, si tout va bien ? »
Elle posa une main rassurante et vaporeuse sur son épaule.
Attends… Vaporeuse ?!
« Ne paniquez pas. Mais… vous n’allez pas vous réveiller. »
Quoi ? Il lui fallut plusieurs longues secondes avant de parvenir à articuler à nouveau :
« P… Pardon ?
- Tout va bien, ne vous inquiétez pas ! » se hâta d’insister la dame.
Elle vient de me dire que je suis mort, mais tout va bien, pas d’inquiétude ?!
« Ok. Je suis en train de rêver. C’est tout. »
Il retroussa sa manche et se pinça le bras. Mais rien n’y fit.
« Mon garçon…
- Non ! » s’exclama-t-il, sentant la panique monter en lui.
Il serra plus fort, si fort qu’il dut se mordre les lèvres pour retenir un cri, et qu’une marque violette s’imprima sur sa peau.
« Non… » souffla-t-il d’une voix rauque.
Abasourdi, il fixa l’herbe émeraude qui dansait sous la brise. C’est pas possible… Sonné, il ne tressaillit même pas quand la femme tira sur son bras pour le sortir de son immobilité choquée.
« Venez, mon garçon. On va tout vous expliquer, suivez-moi. »
Il la laissa l’entrainer vers un groupe qu’il n’avait absolument pas remarqué jusque-là, à quelques dizaines de mètres d’eux. Plusieurs personnes étaient assises en cercle, sur des chaises de camping. Certaines avaient un verre à la main.
« Isabel ! Je vous amène le petit dernier !
- Ah, parfait ! Merci, Nadia, s’exclama une grande dame aux vêtements colorés. Viens t’assoir sur la chaise libre en face de moi, jeune homme. »
Toujours aussi perdu, Robin obéit sans mot dire. On dirait une séance des Alcooliques Anonymes, pensa-t-il machinalement.
« Tu veux boire quelque chose ? On ne sert pas d’alcool aux mineurs, par contre. »
Ça reste dans le thème, c’est bien… Mais qu’est-ce que je raconte ? Qu’est-ce que je fous ici, bordel ?
« Eh bien ? insista-t-elle.
- Euh… Un Orangina… S’il vous plait… » marmonna-t-il.
Aussitôt, un grand gobelet en carton se matérialisa dans sa main droite. Il sursauta si fort que la moitié de la boisson valsa immédiatement par terre. Mais… Quoi ?!
« Bien, nous allons pouvoir reprendre, chantonna la dame en coinçant ses cheveux derrière ses oreilles. Je recommence : bonjour à toutes et à tous, je m’appelle Isabel, et je suis votre Guide du Choix. Comme je vous le disais, nous sommes ici pour déterminer où vous allez ensuite vous retrouver.
- En Enfer ou au Paradis ? » chuchota une jeune fille aux yeux apeurés.
Enfer ? Paradis ? Pitié, faites que je me réveille… C’est pas possible, je suis devenu timbré en tombant…
« Dans une dimension qui correspondra à vos attentes, à vos croyances. Voyez-vous, si vous êtes ici, c’est que vous ne vous attendiez à rien après la mort. Ou que vous ne saviez pas à quoi vous attendre. Ceux qui croient déjà en leur propre vision, ceux qui ont déjà des croyances, vont se retrouver dans l’endroit correspondant à ce à quoi ils s’attendaient. Vous, vous ne savez pas. Mais mes collègues et moi-même sommes là pour vous aider. Je tiens à préciser que notre code de déontologie est très strict. Nous ne sommes pas là pour vous influencer, seulement pour vous aider à accepter votre situation, dans un premier temps, puis à imaginer ce que vous souhaitez vraiment. Mais tout d’abord, nous allons commencer par une petite présentation. Le jeune homme à ma droite, s’il vous plait. Allez-y, présentez-vous, ne soyez pas timide. Comment vous appelez-vous, que faites-vous dans la vie, et, si vous vous en souvenez, comment vous êtes mort. »
Comment vous êtes mort… Robin se frotta le visage, alors que le jeune homme en question répondait d’une voix hésitante.
« Je… Bonjour, je m’appelle Rémi. J’ai 19 ans. Je me bats contre une leucémie depuis 10 ans. Et… euh… voilà. »
Robin frissonna. Oh merde, le pauvre…
« Merci, Rémi. À côté ? »
Une quadragénaire souleva le menton d’un air volontaire.
« Bonjour à tous, je m’appelle Fatma, je suis pompier volontaire et je viens de mourir dans un incendie. Mais je suis heureuse, j’ai réussi à sauver les gens coincés dans la maison, et je crois qu’ils ont pu s’en sortir.
- Oh ! Bravo à vous ! »
Waouh… Les témoignages s’enchainèrent. Quelqu’un avait sauvé des enfants de la noyade, un autre était policier et s’était fait tirer dessus lors d’une mission à haut risque, un médecin était mort d’Ebola après avoir passé des mois en tant que volontaire en Guinée… Je suis tombé dans le cercle des héros, ma parole ! songea l’adolescent. Quand son tour arriva, il se sentit envahi d’une sueur froide.
« Bonjour. Je m’appelle Robin, j’ai 14 ans, et je… »
Les mots se coincèrent dans sa gorge. Je suis mort en essayant d’attraper un pot de Nutella.
Lorsque les présentations furent terminées, on leur proposa une option intéressante. Au lieu de continuer plus loin, ceux qui le voulaient pouvaient se réincarner. Je peux pas rester sur une mort par pot de Nutella, songea Robin. C’est vraiment trop con…
« Qui est volontaire ? »
Il fut le premier à lever la main.

« Mathéo, Nathan ! À table ! »
Les deux petits garçons se précipitèrent vers la salle à manger. La maman de Nathan leur avait préparé un festin. Une montagne de crêpes et un tas de tranches de pain trônaient sur la table.
« Merci, Madame ! s’exclama Mathéo avec gourmandise.
- Avec plaisir, mes petits ! Je vous prépare les tartines ? J’ai un pot de Nutella tout neuf… »
Le visage du petit garçon se décomposa.
« Un problème ? demanda la jeune femme en fronçant les sourcils.
- Je déteste le Nutella, fit-il d’une petite voix.
- Ah bon ? Tu es le premier enfant que je connais qui n’aime pas le Nutella !
- Je sais pas pourquoi, répliqua-t-il en haussant des épaules.
- Bon, c’est pas grave, j’ai aussi du miel et de la confiture. Ça te va ?
- Oh oui ! Merci ! »
Il éloigna la pâte à tartiner de lui avec une grimace de dégoût.

J'adore ! Il est vraiment bien ton texte ! L'idée est originale et j'ai trop ri quand il se dit "Je ne peux pas rester sur une mort par pot de Nutella..."

Bravo

Ton texte est prenant et cette fin m'a bien fait rire Merci pour ton partage !

Merci beaucoup pour vos avis !

Le titre m'a beaucoup intriguée je dois dire ^^ Effectivement pour Robin là je pense qu'on peut parler d'une mort conne J'ai bien aimé le concept d'avoir des espèces de conseillers de l'au-delà pour te guider si tu ne croyais en rien de particulier de ton vivant c'est bien vu ! Et la fin, très bien amenée aussi. J'ai passé un bon moment merci à toi

Merci ! Contente que ça t'ait plu !

J'ai adoré lire ton texte, j'ai trouvé ça rafraichissant, original et très drôle! Comme quoi, le Nutella ça peut être mortel Il y a juste au début tu as placé une de ses pensées au milieu d'un paragraphe et j'avoue que ça m'a pris au dépourvu parce que ce n'était pas en italique "J’ai besoin de grignoter quelque chose." mais c'est tout! En tout cas super texte, bravo!

Excellent texte ! J'ai bien ri. L'intrigue est bien amenée. Reste à travailler un peu l'environnement. Mais normal, en si peu de temps, on ne peut pas travailler complètement son texte.

Merci beaucoup, contente que ça vous ait plu !

@allya33 Effectivement, petit oubli d'italique ^^'

@Sandy59450 Oui, tu as raison, ça manque un peu de description ; je galère toujours un peu à ce niveau-là. Surtout quand il y a l'horaire qui défile... En plus j'ai très mal géré mon temps, cette fois-ci encore plus que les précédentes ^^'

marie_jda a écrit:Merci beaucoup, contente que ça vous ait plu !

@Sandy59450 Oui, tu as raison, ça manque un peu de description ; je galère toujours un peu à ce niveau-là. Surtout quand il y a l'horaire qui défile... En plus j'ai très mal géré mon temps, cette fois-ci encore plus que les précédentes ^^'

Les descriptions, c'est loin d'être ce qu'il y a de plus facile et oui, la contrainte de temps, n'est pas évidente. Moi, je n'ai rien réussi à écrire. J'ai besoin de temps pour réfléchir à mon intrigue et ensuite pour réfléchir à la façon de tourner mon texte. C'était mon premier atelier de ce type, j'espère faire mieux la prochaine fois.

Bonjour, j'ai adoré ton texte ! J'ai beaucoup ri au moment où il dit qu'il ne peut pas rester sur une mort pour du nutella Bien que j'ai eu de la peine pour le personnage étant donné qu'il est mort "bêtement" contrairement au autre témoignage. Bref c'était original comme histoire !

Bravo pour ton texte !
ça s'enchaîne très bien, se lit tout seul. Je n'ai pas ressenti les émotions du personnage lorsqu'il comprend qu'il est mort (tu résumes au lieu de décrire/donner des images fortes). Attention aussi aux listes d'émotion (Dans son état de fatigue et d’agacement, ) qui ne nous permettent pas de ressentir grand-chose non plus
Merci pour ta participation !

Oups pardon Sandy et Lian, j'avais pas vu vos messages...

Sandy : C'est pas si grave si tu dépasses le temps, surtout au début. Au fur et à mesure des ateliers tu finiras peut-être par pouvoir aller un peu plus vite. Et puis après ça dépend des sujets aussi, il y en a où tu vas avoir plus ou moins d'inspiration...

Lian : Merci beaucoup ! Contente que ça t'ait plu !

(Et encore merci Christelle )