Figé - Atelier 24/04

Bonjour, voilà ma participation à l'atelier d'écriture ! Je suis partie sans aucune idée et ai improvisé sur le tas, j'espère que ça vous plaira tout de même ! Je m'excuse d'avance pour les fautes qui auraient pu m'échapper et pour la fin un peu rushée  

Je fixe l’aiguille. La grande. Elle ne bouge plus. Cinq minutes qu’elle ne bouge plus. Mon attention glisse sur la plus petite, immobile elle aussi. Plus de tic tac. Plus de mouvement. Rien.
Je relève le regard. La comtoise installée dans le salon s’est figé également. Ce n’est pas un problème de pile pour l’une, ni un défaut dans l’engrenage pour l’autre, du moins j’en suis certaine. Depuis cinquante ans qu’elle est dans la famille, depuis vingt ans que je la côtoie, elle ne s’est jamais arrêté. Sauf aujourd’hui.
Je souffle. Ne pas paniquer. Après tout rien n’empêche ma montre de tomber en panne en même temps que sa consœur de bois. Sauf que ce n’est pas une panne ordinaire, ou alors le monde entier est également détraqué.
J’inspire, puis me lève, et mes pas me mènent naturellement à la fenêtre laissée ouverte. Le soleil brille dehors, pourtant le silence est roi. Le vrombissement habituel des voitures, la rumeur incessante des passants en contrebas, le chant des oiseaux. Il n’y a plus rien. Seul le silence, assourdissant. Je n’ai pas osé jeter un coup d’œil là en bas. Si tout s’est arrêté, je ne veux pas en être témoin. Bubulle qui s’est figé dans son aquarium m’a suffi, de même que ce soleil de midi immobile, alors que la nuit devrait être tombée depuis plusieurs heures déjà.
Je referme la fenêtre, rabats les rideaux. Il n’y a plus de vent pour les soulever. J’expire, le cœur battant. Ne pas paniquer. Il doit y avoir une raison à tout cela, quelque chose de rationnel, de logique. Une expérience de l’armée ? Un bug de l’espace temps ? Est-ce déjà arrivé par le passé ? Impossible toutefois de répondre à cette question, mon téléphone s’est éteint, l’ordinateur aussi, je ne peux plus accéder à Internet.
Est-ce que je suis morte ? À cette idée, mon sang se glace, un frisson remonte mon échine. Non, non, je ne peux pas être morte. Pas alors que je révisais, sans le moindre danger à proximité. Malgré tout, je retourne dans ma chambre.
Rien n’a bougé. Mon lit est fait. Les feuilles sont proprement rangées sur le bureau. Une pile d’habits repose sur une chaise, attendant d’être rangés dans le placard en face. Pas de sang, pas de signe de violence, ni d’accident.
Je serre mon poing. Mon cœur tambourine contre ma cage thoracique, l’envie de pleurer me noue la gorge à m’en faire mal. Céder à la peur ne mènera à rien pourtant, je dois rester pragmatique, trouver une solution. Je souffle de nouveau. Si je respire, alors je suis en vie, non ?
Quelques secondes plus tard, je suis de retour dans le petit salon, et sans un regard pour Bubulle, je me dirige vers la porte d’entrée. La vie s’est figée, pourtant je peux encore interagir avec les objets. Sans plus me poser de question sur la logique qui régit cette réalité, ma main se pose sur la poignée. L’envie de me calfeutrer sous une couette et d’attendre que le temps passe – si tant est qu’il le puisse encore – me traverse l’esprit l’espace d’un instant, mais je me ravise tout aussi vite. Rester passive ne résoudra rien, il faut que je trouve une solution par moi-même.
Sans réfléchir davantage, j’actionne la poignée et la porte s’ouvre. Tout est silencieux, depuis que les horloges se sont arrêtées, quand bien même j’aurais brisé une vitre ou cassé une chaise. C’est ce silence le plus insupportable, celui qui m’angoisse le plus.
Sans plus attendre, mon pied se pose dans la cage d’escalier. Je suis au quatrième, et à l’idée de mettre un pied à l’extérieur, la peur m’étreint. Et si j’étais la seule à être en vie ? Et si rien ne redevenait comme avant ? Ma gorge se noue de nouveau, de nouveau je retiens des larmes naissantes. Tout va bien se passer. J’expire, le souffle tremblant.
La descente s’entame, silencieuse, comme tout le reste. Suis-je devenue sourde ? Impossible de savoir. Un étage est franchi, puis un autre. Je me perds dans le décompte des marches. En ai-je franchi dix ou cent ? Les portes et les murs se ressemblent tous, le silence lourd m’étouffe pourtant je ne m’arrête pas. Bientôt mes jambes se font douloureuses, le rez-de-chaussée semble loin alors que les escaliers défilent, encore et encore.
Je n’atteins jamais le hall d’entrée de l’immeuble.
Peu à peu, c’est l’obscurité qui m’engloutit, il n’y a plus de murs, plus de portes, plus de marches. Mes propres mains disparaissent dans le noir, et l’espace d’un instant mon corps semble disparaître. Je ne comprends plus où je suis, seul mon cœur palpitant dans ma cage thoracique témoigne de mon existence physique. J’étouffe la panique, et continue d’avancer, ne descendant désormais plus. Autour tout est sombre et ma peur du noir ressurgit, plus puissante que jamais alors que mon cœur s’emballe de nouveau. Je suis morte, il n’y a pas d’autre explication. Mais n’est-on pas apaisé à notre mort ? En paix ?
À cet instant, j'en suis loin, mes mains tremblantes et mes pas nerveux trahissent les émotions qui m’habitent. J’inspire, mais rien ne parvient à calmer cette peur poignante qui enserre ma gorge. Je ne peux pas m’arrêter maintenant, je ne peux pas m’écrouler ici. Je vais trouver une solution.
De la lumière apparaît alors au loin et mon rythme cardiaque s’emballe de plus belle. Est-ce une porte de sortie de cet enfer ? Ou au contraire l’entrée d’un autre, bien pire encore ? Sans réfléchir davantage, je me précipite vers la source lumineuse.
Un cri retentit, puis des pleurs. Je sursaute à l’entente des bruits si soudain, accoutumée au silence qui m’accompagne depuis le début. D’abord je ne vois rien d’autre que cette lueur blanchâtre, mais bientôt une silhouette se détache et je distingue une forme humanoïde, recroquevillée. Mon cœur s’emballe. Il y a quelqu’un d’autre, je ne suis pas seule. Mes foulées s’enchaînent de plus belle, mais bientôt je réalise que ce qui me fait face n’est pas si humain que je l’ai d’abord cru.
J’aperçois une peau blanche, presque translucide, des cheveux fins, clairs eux aussi. J’aurais pu croire à une présence humaine, si deux oreilles pointues ne se détachaient pas de par et d’autre de son crâne. Les sanglots secouent ses épaules et je m’approche, toujours silencieuse.
Un sursaut ébranle l’être, et d’un bon il se redresse, tourné dans ma direction. Ses pupilles orangées me scrutent, fendues, comme celle d’un chat. Je tressaille, mais ne lâche pas du regard la larme argentée qui sillonne sa joue.
— Qui es-tu ?
Ma voix n’est qu’un faible murmure. L’autre secoue la tête, puis son regard se pose sur un objet serré au creux de ses mains. Une larme s’écrase au sol. Une voix résonne alors dans mon esprit, une voix dédoublée, qui se répercute à l’infini.
Je suis désolé.
Puis la lumière, discrète jusqu’alors s’exacerbe et rayonne jusqu’à m’éblouir, ne me laissant d’autre choix que de fermer les yeux. Quand mes paupières se soulèvent de nouveau, seul un tourbillon de lucioles blanches s’envole. Elles sont bientôt englouties par l’obscurité ambiante.
Ne reste au sol qu’une montre à gousset argentée, au cadran brisé.

Super intriguant ce texte, frustrée qu'il s'arrête si vite ^^ J'ai bien aimé le déroulement des évènements la prise de conscience, l'incompréhension, la panique (et Bubulle, le pauvre xD). Tout s'enchaîne très bien ! Tu as une très jolie plume décidément Et du coup, je me demande juste qui est cette créature et ce qu'elle a réellement fait ^^ Bravo à toi !

Merci beaucoup pour ton commentaire ! Je suis contente que mon texte t'ait plu malgré le fait qu'au final il se passe pas grand chose ! (Et oui une petite pensée à Bubulle xD)
Pour ce qui est de la créature j'avoue ne pas trop y avoir réfléchi, j'avais juste dans l'idée un être qui gère le temps à l'aide d'une montre (qu'il a cas sé du coup ^^").
D'ailleurs la phrase "je suis désolé" était une de ses paroles, je l'avais mis en italique sur Word mais je viens seulement de remarquer que ça n'était pas passé sur le forum, j'espère que c'était quand même clair !

J'aime beaucoup ton histoire ! On ressent bien les émotions, et le rythme de tes phrases est très agréable. Tu as une belle écriture. La créature est très mystérieuse aussi, j'ai eu de la peine pour elle, même en la voyant seulement pendant quelques lignes.
Bravo !

J'ai beaucoup aimé ton histoire, c'est très intriguant, on reste accroché au personnage et tu arrives à retransmettre son angoisse. Tu écris très bien, tes phrases sont rythmées, agréables à lire. Un grand bravo à toi  

Bravo pour ton texte ! C'est très bien écrit, c'est rythmé, avec du vocabulaire et ça se lit sans souci. Peut-être une action qui s'appesantit un peu vers le milieu, quand elle sort de chez elle, mais c'est tellement bien raconté que ça ne nous dérange pas trop.
Merci pour ta participation !