Le sang et la braise

Bientôt, il serait là. Arath allait emprunter le chemin menant à son palais et se retrouverait à la portée de ses flèches. Ren n’attendait que cela.

- Je tremble… lui murmura Osham.

- N’aies pas peur. On va l’avoir cette ordure !

Ren ne voulut pas avouer à sa cousine qu’il tremblait lui aussi. Il avait beau se concentrer et faire le vide dans son esprit, rien n’y faisait. Tout ce qu’il pouvait espérer, c’était le dissimuler aux yeux d’Osham.

Une nuée de corbeaux passa à vive allure au-dessus de leurs têtes. Puis vint un grondement similaire au tonnerre, d’abord à peine perceptible, mais qui s’intensifiait jusqu’à en devenir assourdissant. Un vent brûlant suivit, si fort que les arbres se ployaient et que les branches se brisaient. Et enfin apparut la fumée, épaisse et noire comme la nuit. L’odeur âcre, caractéristique de la poudre, l’accompagnait.

- Ca vient d’Ayoum ! hurla Osham, terrifiée.

Ren bondit hors de sa cachette et se mit à courir vers le village. Autour de lui, les bois s’embrasaient un à un, tels des torches géantes éclairant l’obscurité. Au fur et à mesure de sa progression, des cris parvenaient à ses oreilles, cris des cerfs et des loups piégés par les flammes, mais aussi cris de détresse des hommes et des femmes du village.

- Hey ?! Hey ?! Qu’est-ce qu’il se passe ?! lançait-il en attente d’une réponse qui n’arrivait pas.

Osham peinait à le suivre. Son corps entier la brûlait, de ses yeux qu’elle ne pouvait ouvrir à ses poumons remplis de cendre. Elle tombait, se relevait, tombait encore, rampait, se remettait debout, rampait à nouveau…

- Ren ! Attends-moi ! parvint-elle à crier alors que sa silhouette était sur le point de disparaître. L’adolescent revint vers elle, la fit monter sur ses épaules et reprit sa course en avant.

Exténués et à bout de souffle, ils atteignirent la clairière du village. Face à eux se tenait un spectacle de désolation. Toutes les maisons étaient éventrées, les plantes calcinées et les chemins dévastés. Les survivants erraient, hagards, au milieu des ruines. A leurs pieds, il y avait les morts, étendus au pied de chaque habitation. La vieille Saskia, les jumeaux Othis et Mathin, Boralia et ses filles, le prêtre Amor… Tant de visages familiers gisaient sans vie, dans leur propre sang.

Ren se précipita vers sa maison, que les flammes dévoraient encore. Il y trouva son père, ensanglanté et gémissant de douleur.

- Qu’as-tu fait, Olen ? Qu’as-tu fait ?!

- Rien, mon fils… Il n’y avait rien à faire…

Ren avait pointé son arc sur lui, mais la voix caverneuse d’Olen avait toujours cet effet. Pour Ren, Olen incarnait la peur, rien que par sa voix. C’était toujours la même, terrifiante, sombre et emplie d’une haine froide… Celle qui tant de fois, avait humilié Ren et annonçait que les coups allaient pleuvoir sur lui. “Il n’y avait rien à faire…’’ Ces mots résonneraient à jamais dans le crâne de l’adolescent, et il le savait.

Il posa son arc, pris une flèche dans une main et une pierre dans l’autre, s’approcha de son père et lui cracha à la figure avant de s’acharner sur lui. Il lui rendit tous les coups qu’il avait reçu, lui fit souffrir bien plus qu’il n’avait jamais souffert et quand Olen arriva au bord de la mort, il s’interrompit et l’abandonna aux flammes.

Au moment où il sortit, un cri se fit entendre dans tout le village :

- Ils reviennent !

L’instant d’après, une horde de cavaliers surgit des flammes. Ils abattaient leurs fers sur les rescapés, sans faire de distinction entre les hommes et les femmes, les vieillards et les enfants, les blessés et les bien portant. Même les cadavres devaient subir leurs coups. Ayoum ne pouvait plus leur opposer la moindre résistance, alors ils s’en donnaient à coeur joie. Les bourreaux riaient aux éclats face à ce qui n’était qu’un jeu pour eux. L’un d’eux arriva jusqu’à Ren, le sourire aux lèvres devant sa prochaine proie. Ren l’abattit d’une flèche dans la gorge. Il récupéra son épée et se rua sur les autres. Il en tua un, puis deux, puis trois, quatre, cinq, six, sept, huit… Mais c’était leur chef qu’il voulait voir mourir de sa main.

Sur son grand cheval blanc émergeant des flammes, dominant ses hommes par sa posture, il était facile à repérer. Ren le manqua de sa première flèche, l’effleura de sa deuxième et l’atteignit de sa troisième. Impassible, son ennemi l’enleva comme on ôte une vulgaire écharde.

- C’est toi qui t’en prends à mes hommes ? lui dit-il, d’un ton si calme qu’il en tournait à la provocation. Pour seule réponse, Ren lui adressa une nouvelle flèche qu’il esquiva sans mal.

- Tu as une épée dans ton dos, je la vois d’ici. Viens donc te battre un peu, veux-tu ?

Il dégaina la sienne et lui fit face, attendant son attaque. Ren se précipita sur lui, portant une multitude d’attaques parées aisément. Le bruit des fers s’entrechoquant se mêlait aux cris de rage que poussaient Ren à chaque coup porté. Aucun n’atteignait sa cible et son adversaire n’avait rien d’autre à faire que défendre sans difficulté. Son arrogance était telle qu’il le faisait à une main, laissant l’adolescent s’épuiser dans un combat perdu d’avance.

Du coin de l’oeil, Ren aperçut Osham se saisir de l’arc qu’il avait laissé derrière lui. Elle l’arma comme elle put, tenta de viser malgré ses tremblements et décocha. Le chef des cavaliers n’avait rien remarqué et ne put l’éviter. Il s’effondra dans la cendre, la tête transpercée de part en part. Ren laissa tomber son arme et prit Osham dans ses bras. Ils se retournèrent et regardèrent impuissants, leur village finir de se consumer. Tout que n’était plus que sang et braise dans la clairière et la forêt verdoyante qui abritait Ayoum avait disparu dans les flammes.

Yoomise Messages : 58 Date d'inscription : 30/01/2022

Woah, trop cool l'ambiance que tu nous as mijoté en si peu de temps.

Petit bémol malgré tout, on sent que Ren est énervé par la situation mais on ne peut pas deviner qu'il est colérique par nature. C'est un petit soucis propre au fait de l'avoir mis dans l'action directement je pense.

Mais passé ça : Woah Very Happy

Merci pour ton retour ! Je suis assez d'accord avec le point que tu signales, maintenant... j'avais juste envie d'écrire une grosse scène d'action Le sang et la braise 1f602

Lady_Lian Messages : 101 Date d'inscription : 07/10/2021 Age : 36

Bonsoir, bravo pour le texte, je l'ai trouvé génial et l'action était très bien décrit. Je m'y croyais.

Une sacrée scène d'action au budget d'une saison entière de Game of Throne ! xD

J'ai pas grand chose à dire. On ressent bien les émotions, mais c'est plutôt sur la cohérence que ça me gêne ^^ !

Il y a juste le passage où il s'en prend à son père, je ne comprends pas : où est Osham ? Ca me semble étrange qu'elle n'intervienne pas ou qu'il ne s'arrête pas de lui-même en imaginant voir son oncle ainsi tabassé par son fils. Je sais que Ren est sanguin, mais ça me surprend qu'en pleine attaque - donc avec des ennemis - il préfère se battre contre les siens ( son père ) que les envahisseurs. Qui plus est, au risque de perdre la confiance et l'amour de sa cousine dont il est si fier.

Et je suis suprise qu'il a le sourire aux lèvres en abattant des ennemis. Il y a pas de dégoût de tuer, l'odeur, la culpabilité ?! Ca fait très psychopathe ^^" ( pareil qu'avec son père remarque - c'est cohérent - mais ça fait peur xD ).

Et ça m'étonne sur la scène finale qu'il laisse Osham tuer : il sait qu'à vie elle aura du sang sur ses mains. On sait qu'il veut la protéger, qu'il l'aime fort, donc même si c'est un ennemi : je l'imagine pas laisser ôter la vie d'un homme car elle devra vivre avec ce poids ensuite. Voilà xD

Pour moi, il n'y a pas d'incohérences (en tout cas pas à ces points-là que tu mentionnes), mais un manque de clarté de ma part, que j'ai ressenti à l'écriture mais dont j'arrivais pas à me défaire.

Lorsque Ren attaque son père, il s'est séparé d'Osham qui donc n'assiste pas à tout ça. Et le village a déjà été attaqué à ce moment-là et s'apprête à l'être à nouveau (d'où le "Ils reviennent") mais il n'y a plus d'assaillants. Enfin, pour le sourire, pour le coup ce n'est pas Ren qui l'a mais son ennemi.

Maintenant, je le sentais un peu que c'était pas très clair et je me doutais que quelqu'un me ferait la remarque Le sang et la braise 1f605

**Admin** Admin Messages : 571 Date d'inscription : 03/10/2021 Age : 30

Bravo pour ton texte ! Se lit très bien, bon rythme, le caractère de ton Ren ressortait bien.

noire comme la nuit. : a été trop fait

les bois s’embrasaient un à un : les arbres

Il lui rendit tous les coups qu’il avait reçu, lui fit souffrir bien plus qu’il n’avait jamais souffert : le msg comme quoi il le tue parce qu'il n'y avait rien à faire est confus à cause de ça

Merci pour ta participation !

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