Lendemain de soirée

Une violente migraine me sciait le crâne, j’avais rarement eu une gueule de bois pareille. C’était à peine si je me souvenais de la teuf de la veille. Ylan m’avait fait tester des champis qu’il venait d’acheter à son dealer, et à partir de là c’était le black-out total.
La batterie de mon téléphone était morte, l’écran ne s’allumait pas quand j’appuyais dessus.
En voulant me lever, je mis les pieds dans une flaque poisseuse, dont l’odeur âcre me retourna l’estomac. J’avais dégueulé au pied de mon lit, et même un peu sur le haut de mon tee-shirt. Dégueulasse.
Malgré tous mes efforts pour atteindre l’interrupteur sur le mur, je ne le trouvais pas et me heurtais à des meubles dont la disposition commençait à m’inquiéter. J’étais où au juste ?
– C’est quoi ce délire ? grommelais-je en écrasant quelqu’un enroulé dans un duvet.
Il faisait tellement sombre que je ne discernais rien. J’entendais seulement une respiration et le froissement du duvet lorsque la personne remua.
– Je me sens comme une merde, gémit Ylan, à mes pieds.
Il puait de ouf la sueur, mais lui au moins ne s’était pas vomi dessus.
– Tu peux allumer la lumière ? J’y vois que dalle, demandais-je, pensant être dans sa chambre.
J’entendis Ylan se lever, et tâtonner dans la pièce, tout comme je venais de le faire.
– On est où au juste ? demanda-t-il après s’être brutalement cogné le pied contre un meuble.
– J’en sais rien moi, on était chez toi hier soir, c’est pas ta chambre là ?
– Pas du tout ! T’as vomis ou quoi ? Ça sent la gerbe… Attend, j’ai trouvé l’interrupteur.
Il appuya dessus, mais rien ne se produisit. Agacé, il réitéra l’opération une dizaine de fois.
– L’ampoule doit-être grillée, laisse, je vais ouvrir la fenêtre.
– Elle est là, dit-il en ouvrant aussitôt le battant. Euh…
– Ouvre le volet, abruti.
Cette situation commençait à me gonfler. Je n’avais qu’une envie, rentrer chez moi pour prendre une douche.
– Il y a pas de volets… Je commence à flipper là, dit Ylan d’une voix tendue.
L’information me glaça le sang. Je n’y voyais strictement rien, et, dehors, on pouvait entendre les oiseaux chanter et les voitures circuler dans la rue.
– T’y vois quelque chose, toi ? insista Ylan, de plus en plus stressé.
– Non, rien.
Une idée soudaine me foudroya.
– C’est pas tes champis de merde qui auraient cet effet, par hasard ?
– Non, assura Ylan, ça peut pas rendre aveugle les champignons… Si ?
Sa respiration s’accéléra, je l’entendais haleter.
– Qu’est-ce que tu veux que j’en sache ? je m’énervais. C’est pas moi qui les aies acheté, je sais pas ce que c’était.
– Oh putain je vais faire une crise d’angoisse.
– Peut-être qu’on est juste en train de faire un bad-trip, dis-je pour essayer de le calmer. Aussi bien dans quelques heures on n’aura plus de problème.
Franchement, je n’en pensais pas un traître mot. Je flippais tellement que mes membres étaient pris de tremblements compulsifs, et mon mal de crâne avait empiré.
– Appelle les urgences, bredouilla mon pote.
– Et comment je fais ? Je sais même plus où j’ai posé mon portable, et je serai pas capable de composer le numéro.
Un reniflement plaintif résonna dans le fond de la pièce. Il était quand même pas en train de chialer ?
– Putain, Ylan, ressaisis-toi ! C’est rien je te dis, ça va passer, c’est juste un effet secondaire.
Bizarrement, même si je savais que je racontais des mythos, cette idée m’empêchait de me chier dessus moi aussi, et c’était un véritable exploit.

J'aime beaucoup.

Bravo pour ton texte ! il est vraiment unique, bons personnages installés dès le début, bons dialogues, ton original et qui fonctionne. Très bien. ++

Seul truc :
L’information me glaça le sang. : nous sort du ton de la scène, je suis sûre que ton personnage aurait sa manière bien à lui de nous faire passer cette émotion.


Merci pour ta participation !