L'Eclipse magique

—  NON !
Le hurlement qui sort de ma gorge m'extirpe soudainement de ma torpeur. Des perles de sueur se mêlent aux gouttes d'eau de mon visage me forçant à les chasser d'un revers de main.
Les dernières images du cauchemar qui m'assiégeaient se dissipent enfin, jusqu'à ne laisser que des ombres floues dans mon esprit. Mon cœur cogne encore si fort de ce rêve désagréable que son battement résonne dans mon oreille.

Je tente d'attraper ma couverture probablement tombée au sol pour me rassurer. Mes doigts se heurtent alors à un sol de pierres dures et mouillées, et un hoquet de surprise m'échappe.  La fraîcheur et l'humidité de l'endroit me saisissent alors.
Une cave ou un  sous-sol peu entretenus ? Pourquoi suis-je là ?

Afin de me débarrasser de cette sensation de froid, je me lève brusquement et m'ébroue. Mauvaise décision. Mes jambes manquent de défaillir et cognent dans une surface molle, qui bouge. Il ne me semblait pourtant pas avoir abusé de substances.

Mes yeux d'où suintent mes larmes me brûlent. J'essuie le liquide qui en coule et une vérité s'impose : ce ne sont pas des larmes. Mes doigts remontent vers l'origine de cette substance poisseuse.
Mes yeux..ou plutôt mes deux orbites vides.
Quoi ? Quel est ce jeu stupide ?

Un nouveau battement de cœur.

Mon épaule se pose contre un mur pour me laisser reprendre mon équilibre et le fil de mes pensées.
De la lumière et de la chaleur. Non, que de la chaleur. Je réglerai le problème de mes yeux plus tard.
Je ferme les paupières pour me concentrer et invoque une boule qui pourra me prodiguer les deux. Rien. Je grommelle et cherche à nouveau la source de mon pouvoir.
Le deuxième essai se montre aussi peu concluant, tout comme les suivants. Ma magie se révèle inaccessible. Tout comme ma vision.

Un cri guttural m’échappe.

Encore une pulsation dans l'oreille.

Je prends une profonde inspiration avant d’entreprendre une fouille de la pièce. Des effluves chargés d’odeurs putrides atteignent mes narines et mon repas de la veille se déverse à côté de moi.
Non, je n’ai pas trop bu, constaté-je. Alors où est passée ma magie ?
Et le noir, toujours ce noir.

Des souvenirs affleurent à l’orée de mon esprit. Une démonstration époustouflante de mes pouvoirs pour amuser, surprendre et séduire mon audience. Et une djinn.
Qu’est ce qui m’a pris d’accepter ce pari ? Aspirer le souffle aux lèvres d’une djinn de l’ombre. Un bonheur fugace remplacé par une douleur vorace.
Ma magie m’en a voulu, j’en suis sûre. Mais elle aurait déjà dû me pardonner.

Lorsque les soubresauts de mes vomissements se calment, mes mains partent à la recherche de ce que mon pied avait cogné précédemment.
En l’absence de mes capacités habituelles, je me dois de faire confiance à mes vulgaires sens.
Quelle horreur. Reléguée au rang de simple humaine.
La tentative de moquerie ne parvient pas à calmer les tremblements de mes doigts. La magie est une drogue dont je suis devenue une dévouée dépendante.

Un battement plus puissant résonne dans mon oreille.

Mes mains rencontrent une enveloppe flasque mais chaude. Un homme.
Mon oreille collée contre son torse pour percevoir un signe de magie ou ne serait-ce que de vie. Aucune respiration, aucun pouls n’émane de ce corps. Un cadavre.
Il s’agite pourtant et je me recule, effrayée. Un souffle brûlant s’échappe de ses lèvres et le corps éteint retombe prestement au sol.  Une légère vibration et une morsure glaciale m’atteignent.
—  Qu’est-ce que ?
Ma phrase reste suspendue dans le vide avec personne pour y répondre.
Les dernières volutes d’une fumée se posent sur mon visage, piquant la surface qu’elles explorent avant de s’évaporer.. La djinn de l’ombre a également pris son dû sur cet homme.
Mais, contrairement à moi, la chance ne lui a pas souri et il en a péri.

Une pulsation.

Je dois sortir d’ici. Cette conviction ancrée en moi, je laisse mes jambes me relever, plus doucement cette fois-ci. Les murs sont aussi froids et humides que le sol. Mes pieds avancent suivant le trajet de mes mains. Mes narines ne veulent plus s’emplir d’air ; ma bouche prend donc le relais. La fraîcheur de la pièce se répand sur mes lèvres, dans ma gorge et descend vers mes poumons.
Mon réflexe pour trouver la source de mon pouvoir se heurte encore à un mur invisible.
Dehors, il doit faire chaud.   Cette pensée me pousse à continuer.
Mes doigts à la recherche d’une sortie de cette pièce se heurtent à une porte elle tangible. Fermée.
Le peu de force dont je dispose ne suffit pas à l’ouvrir, et je n’ai rien pour la crocheter.


Je ne veux pas mourir ici, pas sans avoir senti à nouveau le doux contact de la magie.
Mes pas me rapprochent ainsi du corps au sol. L’odeur pestilentielle provient du cadavre mais je l’explore à la recherche d’un objet, d’une aide.


Mon oreille me lance de douleur lorsqu’un battement lui parvient à nouveau.
Je sais maintenant que ce n’est pas le mien, ni celui du pauvre homme. Il me faut fouiller, plus vite.
Avec ma magie, je serais déjà sortie.
Des bouts de fer parviennent à attirer l’attention de mes doigts et je les extirpe de la poche du malheureux.

Un cognement contre mon tympan qui m’arrache un cri. Mon butin tombe au sol dans un cliquetis mais je me reprends.

Un battement.


La porte cède dans un grincement joyeux. Je ne peux m’empêcher d’esquisser un sourire alors que les rayons du soleil lèchent, doucement, très doucement, ma peau.

Des cris d’enfants. Des bruits de foule, probablement dans une rue adjacente. L’odeur du pain frais.
Plus de battement de cœur entêtant. Ma magie coule à nouveau en moi comme de l’eau reprenant ses droits. Je suis en vie. Je vais pouvoir voir grâce à mes pouvoirs à défaut de mes yeux.

Un souffle chaud atteint alors ma nuque.
— Je me disais bien que j’en avais perdu un.

Salut !

Ton texte est très bon, bravo ! L'écriture est, dans l'ensemble, belle et agréable à lire (je vais quand même revenir sur un ou deux microscopiques problèmes après), on s'attache assez vite à ton personnage et surtout, la consigne est parfaitement respectée : les autres sens sont très bien utilisés et mis à bon escient. 

Après, comme je l'ai dis, j'ai repéré de tous petits soucis. A quelques moments, il y a des petits problèmes d'écriture. Par exemple, ta première phrase est peut être un poil trop longue et donc, un peu lourde. Un peu plus loin, tu parles de la couverture "probablement" tombée au sol -> le probablement est en trop, il n'apporte rien à la phrase et casse le rythme de lecture. Et j'ai également noté une répétition de "tout comme..." dans ce passage : Le deuxième essai se montre aussi peu concluant, tout comme les suivants. Ma magie se révèle inaccessible. Tout comme ma vision.

Mais à nouveau, je le redis, ton texte est vraiment bon !

Bravo pour ton texte ! Les idées sont intéressantes, tout s'enchaîne bien, c'est juste que tu es un peu à la limite entre le "trop alambiqué" et le "classique". Et parfois tu la franchis.

de ce rêve désagréable : déjà dit avant que c'était un cauchemar, en trop je pense

Mes yeux d'où suintent mes larmes me brûlent. : j'ai l'impression que ça manque de rythme dans certaines phrases

Mes doigts à la recherche d’une sortie de cette pièce se heurtent à une porte elle tangible. : la phrase ne fonctionne pas je pense, à simplifier

Merci pour ta participation !