Le nasique et le boeuf
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- misstic21
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Localisation : Haute-Savoie
Le nasique et le boeuf
Dim 1 Oct - 22:34
Trois coups secs m’arrachent de mon sommeil. Secouée par un soubresaut, j’ouvre les yeux trop vite sur la lumière de ma lampe de bureau, qui m’éblouit. Péniblement, je décolle mon visage de mes dossiers de comptabilité. Je me suis encore endormie en plein travail. Si mon manager continue de me donner autant de boulot, je vais finir par faire un burn-out.
A nouveau, on frappe à la porte, de manière plus insistante cette fois. Je réalise qu’il fait nuit. Ok, le soleil se couche tôt en hiver, mais quand même ; qui peut bien venir frapper chez moi à cette heure-ci ? Un voisin ?
Je vais pour ouvrir la porte, passe d’abord un œil par le judas. Euh… Qu’est-ce que les flics font à ma porte ? Encore toute débraillée et les cheveux en bataille, je m’empresse d’ouvrir la porte. Deux hommes en uniforme de policier me toisent de haut en bas. Le premier, aussi imposant qu’un frigo américain, mâchouille un chewing-gum avec autant de classe qu’un nasique ; le second, petit et grassouillet, transpire comme un bœuf, visiblement épuisé par les deux étages d’escaliers.
— Bonsoir messieurs.
— Mademoiselle Lena Moreau ? crache le frigo.
— C’est bien moi. Qu’y a-t-il ?
— Nous vous rendons visite au sujet d’une certaine Emma Leroy, a priori votre collègue de bureau.
— Emma ? Oui, nous travaillons ensemble depuis cinq ans déjà, elle…
— Sachez qu'elle a été retrouvée pendue sur son lieu de travail, et donc dans votre bureau, il y a de cela quelques heures…
J’ai brusquement un haut-le-cœur. Emma ? Emma, ma collègue de longue date, mère de deux ados, l’optimisme incarné, cette Emma-là ? Impossible.
— C’est votre manager qui a découvert le corps d’Emma – d’après ses dires, partiellement dénudé – suspendu à la poutre apparente centrale avec ses propres lacets de chaussure…
— Non, s’il vous plait, je ne veux pas savoir les détails…
— Mademoiselle, nous aurions quelques questions à vous poser, vous permettez ?
Le géant entre dans mon appartement sans attendre mon approbation. Je suis tellement sonnée que je ne proteste pas et avance comme un robot vers la table de la cuisine. Les deux policiers s’installent face à moi. Le rondouillard, qui dégage une odeur acide de transpiration, renifle jusqu’à en avaler ses glaires. Quand son regard glisse vers ma poitrine, je referme la fermeture éclair de mon gilet. Il sort un calepin de l’intérieur de son pantalon, me laissant tout le loisir d’admirer ses bourrelets, et se contente de prendre des notes pendant que son acolyte m’interroge.
— Lena… Lena Moreau. Avez-vous dernièrement remarqué un comportement suspect de la part de votre collègue Emma ?
— Non, pas particulièrement…
— Quelque chose qui aurait laissé supposer qu’elle avait envie de mettre fin à ses jours… En lien avec sa vie personnelle, peut-être ?
— Non, vraiment, je ne sais pas.
— Allez, entre gonzesses, vous vous racontez bien des ragots, des trucs un peu intimes ? s’immisce le disgracieux.
— Elle a dû vous avouer quelque chose, reprend le géant. Est-ce qu’elle était maltraitée par son mari ?
— Il n’y a pas de raison, son mari a toujours… avait toujours des petites intentions pour elle…
— D’accord, d’accord… et au travail, ça se passait bien ? Vous vous entendiez bien, toutes les deux ?
— Relativement, oui. Comme des collègues.
— Vous pouvez être un peu plus claire ?
— Euh… Hum. On sortait boire un verre de temps en temps. Elle avait un optimisme débordant, parfois inapproprié dans un cadre professionnel. Enfin, c’est… c’était agréable, quand même, de travailler avec une femme toujours de bonne humeur…
Ma voix commence à se briser. Un nœud se forme dans ma gorge mais je contiens mes larmes, m’efforçant de coopérer. En relevant les yeux vers les deux policiers, je surprends le petit grassouillet en train de lécher le bout de son stylo, à me regarder avec un regard lubrique. Une nausée me prend au dépourvu et je suis forcée de détourner mon attention en direction du grand ruminant.
— Alors vous n’avez rien à nous dire qui puisse faire avancer l’enquête, Mademoiselle Moreau, vous êtes sûre ? Vous savez, on a toute la soirée...
Il m’affiche un large sourire entendu. A son tour, son regard fuite en direction de mes seins. Je croise les bras sur ma poitrine, totalement hermétique à ces deux animaux. Pourquoi je les ai laissés entrer chez moi déjà ?
A nouveau, on frappe à la porte, de manière plus insistante cette fois. Je réalise qu’il fait nuit. Ok, le soleil se couche tôt en hiver, mais quand même ; qui peut bien venir frapper chez moi à cette heure-ci ? Un voisin ?
Je vais pour ouvrir la porte, passe d’abord un œil par le judas. Euh… Qu’est-ce que les flics font à ma porte ? Encore toute débraillée et les cheveux en bataille, je m’empresse d’ouvrir la porte. Deux hommes en uniforme de policier me toisent de haut en bas. Le premier, aussi imposant qu’un frigo américain, mâchouille un chewing-gum avec autant de classe qu’un nasique ; le second, petit et grassouillet, transpire comme un bœuf, visiblement épuisé par les deux étages d’escaliers.
— Bonsoir messieurs.
— Mademoiselle Lena Moreau ? crache le frigo.
— C’est bien moi. Qu’y a-t-il ?
— Nous vous rendons visite au sujet d’une certaine Emma Leroy, a priori votre collègue de bureau.
— Emma ? Oui, nous travaillons ensemble depuis cinq ans déjà, elle…
— Sachez qu'elle a été retrouvée pendue sur son lieu de travail, et donc dans votre bureau, il y a de cela quelques heures…
J’ai brusquement un haut-le-cœur. Emma ? Emma, ma collègue de longue date, mère de deux ados, l’optimisme incarné, cette Emma-là ? Impossible.
— C’est votre manager qui a découvert le corps d’Emma – d’après ses dires, partiellement dénudé – suspendu à la poutre apparente centrale avec ses propres lacets de chaussure…
— Non, s’il vous plait, je ne veux pas savoir les détails…
— Mademoiselle, nous aurions quelques questions à vous poser, vous permettez ?
Le géant entre dans mon appartement sans attendre mon approbation. Je suis tellement sonnée que je ne proteste pas et avance comme un robot vers la table de la cuisine. Les deux policiers s’installent face à moi. Le rondouillard, qui dégage une odeur acide de transpiration, renifle jusqu’à en avaler ses glaires. Quand son regard glisse vers ma poitrine, je referme la fermeture éclair de mon gilet. Il sort un calepin de l’intérieur de son pantalon, me laissant tout le loisir d’admirer ses bourrelets, et se contente de prendre des notes pendant que son acolyte m’interroge.
— Lena… Lena Moreau. Avez-vous dernièrement remarqué un comportement suspect de la part de votre collègue Emma ?
— Non, pas particulièrement…
— Quelque chose qui aurait laissé supposer qu’elle avait envie de mettre fin à ses jours… En lien avec sa vie personnelle, peut-être ?
— Non, vraiment, je ne sais pas.
— Allez, entre gonzesses, vous vous racontez bien des ragots, des trucs un peu intimes ? s’immisce le disgracieux.
— Elle a dû vous avouer quelque chose, reprend le géant. Est-ce qu’elle était maltraitée par son mari ?
— Il n’y a pas de raison, son mari a toujours… avait toujours des petites intentions pour elle…
— D’accord, d’accord… et au travail, ça se passait bien ? Vous vous entendiez bien, toutes les deux ?
— Relativement, oui. Comme des collègues.
— Vous pouvez être un peu plus claire ?
— Euh… Hum. On sortait boire un verre de temps en temps. Elle avait un optimisme débordant, parfois inapproprié dans un cadre professionnel. Enfin, c’est… c’était agréable, quand même, de travailler avec une femme toujours de bonne humeur…
Ma voix commence à se briser. Un nœud se forme dans ma gorge mais je contiens mes larmes, m’efforçant de coopérer. En relevant les yeux vers les deux policiers, je surprends le petit grassouillet en train de lécher le bout de son stylo, à me regarder avec un regard lubrique. Une nausée me prend au dépourvu et je suis forcée de détourner mon attention en direction du grand ruminant.
— Alors vous n’avez rien à nous dire qui puisse faire avancer l’enquête, Mademoiselle Moreau, vous êtes sûre ? Vous savez, on a toute la soirée...
Il m’affiche un large sourire entendu. A son tour, son regard fuite en direction de mes seins. Je croise les bras sur ma poitrine, totalement hermétique à ces deux animaux. Pourquoi je les ai laissés entrer chez moi déjà ?
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- Krissa Danos
- Messages : 19
Date d'inscription : 22/09/2023
Age : 25
Localisation : Lyon
Re: Le nasique et le boeuf
Dim 1 Oct - 22:52
Je crois que c'est moi qui ai eu peur... À la fin, argggh des frissons ! Au final, ce sont vraiment des flics ou... ?
Bravo pour ton texte ! Il est fluide, intéressant, même drôle au début : "Le premier, aussi imposant qu’un frigo américain, mâchouille un chewing-gum avec autant de classe qu’un nasique ; le second, petit et grassouillet, transpire comme un bœuf, visiblement épuisé par les deux étages d’escaliers."
L'émotion est le dégout, je présume ? Encore bravo à toi !
Bravo pour ton texte ! Il est fluide, intéressant, même drôle au début : "Le premier, aussi imposant qu’un frigo américain, mâchouille un chewing-gum avec autant de classe qu’un nasique ; le second, petit et grassouillet, transpire comme un bœuf, visiblement épuisé par les deux étages d’escaliers."
L'émotion est le dégout, je présume ? Encore bravo à toi !
misstic21 et ninja-janine aiment ce message
- misstic21
- Messages : 96
Date d'inscription : 07/10/2021
Age : 31
Localisation : Haute-Savoie
Re: Le nasique et le boeuf
Lun 2 Oct - 11:08
[quote="Krissa Danos"]Je crois que c'est moi qui ai eu peur... À la fin, argggh des frissons ! Au final, ce sont vraiment des flics ou... ?
Bravo pour ton texte ! Il est fluide, intéressant, même drôle au début : [i]"Le premier, aussi imposant qu’un frigo américain, mâchouille un chewing-gum avec autant de classe qu’un nasique ; le second, petit et grassouillet, transpire comme un bœuf, visiblement épuisé par les deux étages d’escaliers."[/i]
L'émotion est le [b]dégout[/b], je présume ? Encore bravo à toi !
[/quote]
Merci pour ton retour ! Oui c'est bien le dégoût, et oui ce sont bien des policiers, qui se permettent des familiarités sous couvert de leur "professionalisme"... Ce n'est pas du tout le genre d'ambiance à laquelle je suis habituée, ça change
Bravo pour ton texte ! Il est fluide, intéressant, même drôle au début : [i]"Le premier, aussi imposant qu’un frigo américain, mâchouille un chewing-gum avec autant de classe qu’un nasique ; le second, petit et grassouillet, transpire comme un bœuf, visiblement épuisé par les deux étages d’escaliers."[/i]
L'émotion est le [b]dégout[/b], je présume ? Encore bravo à toi !
[/quote]
Merci pour ton retour ! Oui c'est bien le dégoût, et oui ce sont bien des policiers, qui se permettent des familiarités sous couvert de leur "professionalisme"... Ce n'est pas du tout le genre d'ambiance à laquelle je suis habituée, ça change
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- DiBacoli
- Messages : 23
Date d'inscription : 07/10/2021
Age : 34
Localisation : Juste là
Re: Le nasique et le boeuf
Lun 2 Oct - 11:28
Ahlala, les agents assermentés ; ils couvrent souvent entre eux. Et s'encouragent tacitement à ces familiarités.
Le texte est fluide et les dialogues pertinents. On identifie très vite l'émotion sans que ce soit obvious, elle sera confirmée à la toute fin. Très bel atelier !
Le texte est fluide et les dialogues pertinents. On identifie très vite l'émotion sans que ce soit obvious, elle sera confirmée à la toute fin. Très bel atelier !
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- zebulon911
- Messages : 118
Date d'inscription : 07/10/2021
Localisation : pas loin
Re: Le nasique et le boeuf
Lun 2 Oct - 19:51
Félicitations, tu as écrits un beau texte
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- ninja-janine
- Messages : 102
Date d'inscription : 29/01/2023
Re: Le nasique et le boeuf
Lun 9 Oct - 23:52
Moi aussi il me fait flipper ton texte. Le dégoût bien sûr, ces deux flics sont vraiment bizarre si ce sont vraiment des flics... On peut tout imaginer après ce début de texte. En tout cas, j'ai beaucoup apprécié la lecture
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