Incompréhension

Où suis-je ? Que m’arrive-t-il ?

Je ne voyais plus rien. J’avais beau fermer et ouvrir sans arrêt mes paupières, hélas, les ténèbres demeuraient encore. À bout de force, je réussissais tout de même à sortir du lit. Mon corps était gelé, je ne pouvais m’empêcher de claquer des dents.

Au loin, j’entendais le bourdonnement d’une cascade. La sortie ne devait pas être bien éloignée.

— Il y a quelqu’un ? J’ai besoin d’aide, m’écris-je en marchant avec prudence.

De mes mains, je touchais la paroi rocheuse avec l’espoir de retrouver les champs de fleur. Je me souviens être allé me promener dans les jardins de ma mère. Prends un bain de soleil et respirer longuement les fleurs. Après, c’est le trou noir. La roche devint plus lisse et perdait de l’humidité à mesure que j’avançais.

— Encore un dernier effort ! N’abandonne pas Mélina !

Enfin, une douce fragrance florale me parvint. La sortie de cette maudite grotte devait être à quelques pas. Un large sourire se dessina sur mon visage. Bientôt, je pourrai retrouver mère et tout ne serait plus qu’un cauchemar.

L’odeur enivrante et entêtante devint plus forte.

Sous mes pieds nus, je sentis une sensation si familière. Enfin de l’herbe et non plus cette pierre si dure et désagréable.

— Mère, appelais-je avec l’espoir qu’elle entendre mes supplications.

Aucune réponse. Juste l’écho de ma propre voix qui revenait dans mes oreilles. Avais-je bu où manger quelque chose de mauvais ? Il n’y avait pas de raison pour que je me retrouve dans cet état.

Subitement, je trébuchai sur une racine. Dans ma chute, je me cognai la tête.

Aïe ! Gémis-je en essayant de me relever.

Peine perdue, mes bras refusaient d’obéir. Mon petit corps n’avait plus aucune force. Vaincue, ma tête resta sur l’étendue d’herbe qui me grattait la peau.

Dans un dernier espoir, je touchai le sol de ma main.

Ô grande déesse Déméter
Viens à mon secours !

Mère venait toujours à mon aide.

Un bruit retendit derrière moi. Semblable à un hurlement de cyclope. La terre se mit à trembler de plus en plus. Mon corps se contracta avec une telle force que je crus qu’il allait se briser en plusieurs morceaux. Une douleur atroce martelait mon crâne.

J’ouvris brusquement les paupières.

Malheureusement, toujours le noir complet.

— Cesse de bouger ! Ordonna une voix grave.

En l’entendant, mon corps se raidit. Mon premier réflexe fut de reculer le plus loin possible de lui.

— N’aie pas peur ! Je ne te veux aucun mal Mélina.

—Que m’as-tu fait ? Hurlai-je en butant sur une paroi dure et froide.

— Je ne suis pas le responsable de ton état. Je suis ton sauveur.

L’inconnu se leva de la couche, je l’entendais faire les cent pas. Il semblait nerveux.

— Où suis-je ? Demandais-je en essayant une dernière fois de me lever.

— Au Champ Élysées !

Je restai bouche bée pendant un petit moment.

— Non, je ne peux pas être morte ! Criais-je.

De nouveau, mon corps me trahit en refusant de bouger. C’était un menteur ! Si j’étais réellement dans un tel lieu, j’aurais dû retrouver la vue. Les prêtres ne disaient-ils pas que plus aucune douleur ni maladie ne touchait les défunts au Champ Élysées.

— Tu es morte. Il ne sert à rien de résister vainement, dit-il en s’approchant de moi pour me saisir la main.

Son toucher sur ma peau me brûla. Instinctivement, je retirai ma main d’un geste brusque.

— Je dois rentrer chez moi. Mère doit s’inquiéter de mon absence.

— Tu n’appartiens plus au monde des vivants. Je comprends que c'est dur pour toi de l’accepter, mais il faudra bien t’y résoudre.

— Dans ce cas, pourquoi n’ai-je pas rencontré le dieu Hadès ? Répondis-je, buté.

— Je suis devant toi !

Un rire nerveux s’échappa de mes lèvres.

Morphée est bien cruel de continuer de se jouer de moi, pensais-je.

L’homme m’attrapa de nouveau la main. Une autre sensation de brûlure, mais plus intense me picota la peau. Cette fois, ce n’était pas désagréable, bien au contraire, j’avais l’impression que mon corps se réchauffait.

— Pardon mon impolitesse ! Dis-je d’une petite voix craintive.

Il n’était plus temps de se voiler la face. Je me retrouvais en face du dieu des enfers. J’avais eu le culot de lui manquer de respect. Pourvu qu’il ne m’envoie pas au Tartare.

— J’imagine que tu as des questions. Je peux y répondre maintenant que tu acceptes enfin la vérité.

Le dieu se tut.

Son silence me pesait. J’avais l’impression de me trouver sur des chardons ardents.

— Persephone t’a maudite. Le poison qui t'a ôté la vie condamnée ton âme à disparaître à tout jamais. Je suis venue à temps pour t’emmener dans mon royaume. J’ai réussi à contenir la malédiction, mais il y a un prix. Tu ne pourras plus jamais voir.