La painpauté
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Akari Mizuki
Akari Mizuki
Messages : 71
Date d'inscription : 07/10/2021
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Localisation : Franche-Comté

Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) Empty Cécité (On dit ssaiçitay en pouler)

Dim 30 Juil - 16:07
CÉCITÉ

Ce texte est très expérimental, j'espère qu'il n'est pas hors-sujet ! Bonne lecture les miettes  I love you


Mon corps flotte dans le vide. Un goût sucré écœurant persiste dans ma bouche, comme si j’avais mangé trop de guimauve. Je ne sais plus où je suis, ni quelle heure il est. Seule cette sensation de plénitude m’accapare.

Puis, j’ai l’impression de tomber.

Une vague d’angoisse me serre la poitrine, et ma respiration se coupe. Je me redresse soudainement, avalant de grosses goulées d’air. Mes poumons me brûlent, ma tête est prisonnière d’un brouillard épais. Je suis immédiatement tentée de me rallonger, tant mon corps est courbaturé.

Comment suis-je arrivée ici, dans cette pièce sombre ? Dans mon esprit les souvenirs sont flous. Des hommes en noirs et des blouses blanches se mélangent. Seule une douleur résiduelle à l’arrière de mon crâne m’indique que j’ai été assommée. J’étais dans un café, le nez dans mon ordinateur pour finaliser l’article qui doit paraître dans le journal de demain. Je me souviens vaguement de l’homme au long imperméable qui me guettait depuis sa table. Puis le néant.

Je tâte le lit, à la recherche du bord. L’obscurité est telle que je ne distingue même pas les contours d’une porte. La seule chose que je distingue, c’est la rugosité des draps dans lesquels de repose, et une odeur de Bétadine qui flotte dans la pièce.

Lorsque mes pieds trouvent le sol, sa froideur me provoque un frisson. Je ne suis définitivement pas à l’hôpital. Le ronronnement des machines autour de moi a quelque chose d’angoissant. Curieusement, je ne sens aucun fil qui me relient à elles, aucune perfusion qui m’injecte quelque substance chimique.

Lorsque je me lève, mes jambes flageolent comment celles d’un bébé faon. Mes mains tremblantes tâtonnent devant moi à la recherche d’obstacles. J’avance à petits pas, comme un nouveau-né. Que m’ont-ils fait pour que mes muscles soient aussi engourdis ? Vais-je en direction de la porte ? Du mur ? Je n’en ai aucune idée. J’ai l’impression que les murs se resserrent sur moi.

Il faut que je trouve un interrupteur.

Le carrelage sous mes pieds est glacé, le tissu de mes vêtements me gratte et je ne cesse de me cogner contre des coins de meubles. Je trouve enfin le mur, mais j’ai beau parcourir sa surface lisse, je ne trouve aucun interrupteur, aucune porte, aucune fenêtre.

Soudain, j’entends le cliquetis d’une poignée de porte derrière moi. Je plaque mon dos contre le mur. Quelqu’un entre – une femme à en juger par sa voix – mais je ne la vois pas.

— Docteur, le sujet 1452 s’est réveillé.

Une autre personne entre dans la pièce, et une odeur d’eau de Cologne me prend au nez. Pourquoi n’allument-ils pas la lumière ?

— Encore debout après la dose qu’on vous a injecté ? Vous êtes une dur à cuire.

Son ton narquois me retourne l’estomac. Je l’entends s’approcher, et je me plaque tout entière contre le mur, dans l’espoir de mettre de la distance entre nous.

— De quoi vous parlez ? Pourquoi il fait si noir ?

— Noir ? On y voit comme en plein jour.

Mon estomac se soulève. Je tente de garder le contrôle de ma respiration, mais je me sens aussi anxieuse qu’un lièvre face à un renard.

— J’exige une explication !

Ma voix part dans les aigus. Je me sens bête. J’aurais dû mieux maîtriser ma peur, pour ne pas leur donner l’impression qu’ils ont le dessus sur moi.

Le silence de mes interlocuteurs m’angoisse encore plus. S’il n’y avait pas cette odeur d’eau de Cologne, je jurerais qu’ils sont partis. L’un d’eux s’approche de moi. Il ne me touche pas, mais je sens sa présence juste en face de moi.

— Intéressant. La dose administrée a provoqué une cécité chez ce sujet, marmonne l’assistante en gribouillant sur du papier.
— Comment ça ?

— Eh bien, il semblerait que notre expérience prenne une tournure très intéressante...

Comment ça, une expérience ? Où est-ce que j’ai atterri ? Ma gorge est tellement nouée que je n’arrive pas à répondre.

— Il faut que nous prenions des mesures tout de suite, répond le docteur. Allez chercher l’équipe de test.

C’en est trop.

Mon genou vient se loger dans le ventre de l’assistante en face de moi. Elle suffoque et se laisse tomber sur le sol. Je me précipite vers le docteur, mais ses grosses mains moites saisissent mes poignets.

— Sécurité ! aboie-t-il, en direction de ce que je suppose être le couloir.

Il doit être beaucoup plus grand et corpulent que moi. Il parvient sans aucune peine à me mettre les bras dans le dos. Malheureusement pour lui, il n’anticipe pas mon coup de pied. Il émet un petit cri aigu et relâche mes poignets.

Je me rue dans le couloir. Je cours, les mains parcourant des arcs de cercle devant moi pour anticiper les obstacles. Des gens crient autour de moi, s’agitent. Mes oreilles bourdonnent tellement que je ne comprends plus ce qu’on me dit. Tant pis pour mes courbatures, tant pis si je me blesse ; je ne pense qu’à une chose : fuir.

— Mademoiselle, arrêtez-vous immédiatement, les mains dans le dos !

J’ignore l’avertissement de l’agent de sécurité. Il court derrière moi, accompagné de plusieurs collègues.

Soudain, quelque chose se plante dans ma nuque dans un sifflement.
Mes muscles redeviennent aussi mou qu’à mon réveil. Je m’écroule au sol. Que se passe-t-il ? Mon esprit devient brumeux, le goût écœurant de guimauve me revient en bouche. Non ! Je ne dois pas m’évanouir !

— Ramenez-là en cellule, ordonne l’agent de sécurité à ses collègues. Le protocole de sécurité va devoir être révisé.

Des mains me soulèvent. Les chuchotements des témoins me font l’effet d’un millier d’aiguilles qui se plantent dans mon crâne. Juste avant de perdre connaissance, j’entends le docteur susurrer tel un serpent.

— Cette expérience s’annonce très intéressante.

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Céhah
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Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) Empty Re: Cécité (On dit ssaiçitay en pouler)

Dim 30 Juil - 16:58
Owi du pouler ! Mwa jem le pouler, surtou kan il é griyai !  Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) 1f600 

Plus sérieusement, je pense pas que ton texte soit hors-sujet, bien au contraire ! On peut difficilement être plus dans le thème je pense ! Et un atelier, c'est aussi fait pour expérimenter justement  Wink

Le seul point qui m'a fait un peu tiquer, c'est que ton héroïne arrive à quand même bien coordonner ses mouvements pour quelqu'un qui vient tout juste de perdre la vue. C'est surtout le cas au moment de la bagarre, qu'elle arrive à frapper sans problème les deux médecins face à elle, je ne sais pas si c'est cohérent pour le coup.

Mais à part ça, franchement, je vois rien à redire. Bravo !
misstic21
misstic21
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Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) Empty Re: Cécité (On dit ssaiçitay en pouler)

Dim 30 Juil - 17:59
J'aime beaucoup, c'est très prenant et... Angoissant. Bravo pour ce texte !

DiBacoli aime ce message

DiBacoli
DiBacoli
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Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) Empty Re: Cécité (On dit ssaiçitay en pouler)

Dim 30 Juil - 18:01
Joli texte. Très prenant, très belle lecture sur un thème pas évident. Bravo
ozalee_naturae
ozalee_naturae
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Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) Empty Re: Cécité (On dit ssaiçitay en pouler)

Lun 31 Juil - 10:26
J'ai bien aimé ton texte !
Le personnage principal qui est déshumanisé par l'équipe médicale suscite l'empathie.
Je trouve que tu respectes très bien le thème personnellement ! Very Happy
Après comme l'a dit Céhah, la protagoniste de ton histoire semble avoir une certaine facilité (alors qu'elle ne voit rien) à par exemple repérer et frapper le docteur.
Mais sinon, à part ce petit point, c'est super !
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Cécité (On dit ssaiçitay en pouler) Empty Re: Cécité (On dit ssaiçitay en pouler)

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