Le pauvre bougre

Cartes tirées: la maison dieu; la justice; le pape (j'ai choisi la maison dieu)

— Petit Jean, arrête-toi ! Stop ! hurla Petit Louis.

Jean jura, le tracteur crachota avant de s’immobiliser.

— Tu l’as pas remarqué ou quoi ? Y a un quelqu’un d’allongé là… sur ta droite.

— C’est pas croyable ça ! Va voir de quoi il retourne, P’tit Louis et fous-moi cet olibrius hors de mon champ.

— Je t’avais dit que c’était pas une bonne idée, l’herbe est trop haute, on n’y voit que dalle. Une chance que je t’ai accompagné au lieu d’aller abreuver les vaches. Bon dieu

Petit Louis sauta hors du tracteur. Incapable ni de bouger ni de parler l’autre restait immobile. Plantée dans ses haillons déjà en bien mauvais état la herse le retenait prisonnier. Heureusement le cultivateur avait stoppé son engin juste à temps pour lui éviter d’être trucider. S’il se libérait de lui-même il allait se retrouver le bras en charpie et les fesses à l’air. Comme un fou il agita un bras, une main et ses quatre doigts.

— La panique vous fait dérailler, parole de Jean Rivière ! Qu’est-ce qui vous a pris de dormir dans mon champ ?

— Tête-bleu que voilà une mortelle blessure. Petit Jean, je crois qu’on a un problème, s’exclama Petit Louis effrayé en se grattant le sommet de son crâne chauve.  Lève la herse, il peut pas bouger sinon, le pauvre bougre.

— Il peut pas se barrer et nous laissez tranquille. Vous voyez pas que vous gênez ?

— Petit Jean, t’énerve pas. J’appelle les secours.

Portable à l’oreille, il donna les informations aux secours, mais les secours ne pouvaient pas venir tout de suite. Petit Jean

— Et bien quoi, il est pas mort. Il arrête pas de gesticuler.

— Je crois qu’il peut pas parler et… la vache ! Tu lui as carrément arraché le bras.

— Qu’est-ce qu’on va faire du manchot ?

Petit Jean s’approcha, eut un haut le cœur devant le spectacle, recula les paumes en l’air comme s’il n’acceptait pas de voir le bras ensanglanté séparé du corps. Sa colère tomba d’un coup.

— Tout ce sang. Pourquoi tout ce sang dans mon champ ?

Il ne pensait plus à son labour, la vue du sang avait toujours le même effet sur lui, il tourna de l’œil et sur lui-même et s’effondra de tout son long.

— Allons bon, il manquait plus que ça.

Petit Louis déambula autour du tracteur, perdu, déboussolé. Qu’allait-il faire des deux corps allongés sur le sol, l’un bien vivant, l’autre presque mort.

— Ben oui, à force de perdre tout son sang, le pauvre bougre va pas survivre bien longtemps.

Il déambula autour du tracteur en se creusant les méninges. Que faire ? Il jaugea la situation, mal à l’aise. L’homme toujours couché, gesticulait de sa main valide. Petit Louis ne parviendrait pas de lui-même à raccommoder le bras à l’épaule. Puis lui vint une idée. Le vétérinaire ! Pensionné depuis près de trente ans il n’habitait pas très loin, il saurait quoi faire en ces temps de pénurie de médecin. Il détacha la herse, grimpa dans le tracteur et fonça au village sous les yeux d’une vieille dame médusée qui passait par là.

Des bribes d’averses se mirent à tomber, Petit Jean sortit du coaltar avec peine. Il se précipita sur l’homme, tenta en vain de raccrocher le bras à l’épaule dans un effort désespéré de se faire pardonner. Vouées à l’échec ses tentatives avortèrent. Terrifié, l’homme continuait d’agiter son bras valide sous le nez de Petit Jean qui n’y comprenait rien.

— Va falloir que je me fasse pardonner tout ça. Si vous étiez là, dans mon champ, c’est que vous aviez nulle part où aller, pas vrai ?

L’homme hocha faiblement la tête.

— Bon alors si vous décidez de rester en vie, je suis prêt à me faire pardonner mes mauvaises paroles mais vous allez pas me traîner devant m’sieur le juge pas vrai ?

L’homme secoua la tête, le regard plein d’espoir planté dans celui de Petit Jean.

— Bon, je suppose que vous aviez des ennuis…

Hochement de tête.

— D’accord ! Alors je vais vous faire une promesse, je vais essayer de devenir meilleur envers les pauvres bougres comme vous. Dès que votre bras sera raccommodé, je vais d’abord vous loger et puis…

Il réfléchit un instant.

— Puis, je vais vous embaucher. Je trouve personne pour travailler au champ. Nourri, logé, ça vous dirait de travailler pour moi ?

Nouveau hochement de tête vigoureux. Petit Jean ne vit plus que le blanc de ses yeux et ses lèvres exsangues étirées dans un sourire ravi.

Eh ben, quel trio de bras cassés, l'un littéralement et les deux autres métaphoriquement !

Blague à part, ton texte est assez drôle et caustique donc bien joué pour ça. Par contre, a plusieurs reprises, j'ai l'impression qu'il manque de la ponctuation pour alléger un peu certaines phrases (exemple : "Plantée dans ses haillons déjà en bien mauvais état la herse le retenait prisonnier"). Pareil, il y a certaines tournures de phrases qui me paraissent assez étrange, genre "des bribes d'averses" : on comprend l'idée, mais je ne suis vraiment pas certain que cela se dise.

Pauvre bougre effectivement. x) On m'a souvent prévenue des dangers des machines agricoles. Une fois pris dans la herse, il n'avait quasiment aucune chance de survivre.

J'ai eu un peu de mal à suivre au début avec les répétitions de "Petit Jean" et "Petit Louis". Mais après ça a été.

"Vouées à l’échec ses tentatives avortèrent" cette phrase me gêne un peu. C'est peut-être juste moi. Je pense que juste "ses tentatives étaient vouées à l'échec" aurait suffit. Ca fait un peu superflu avec le "avortèrent".

Sinon c'est un très bon texte !

Tu es écrit une belle histoire

Bravo pour ton texte ! Il est plaisant à lire, bien écrit, les dialogues sont drôles, les deux personnages sont vraiment super.

Plantée dans ses haillons déjà en bien mauvais état la herse le retenait prisonnier. : pas compris la phrase

déambula autour du tracteur : dit deux fois

Merci pour ta participation !