- Romane
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Date d'inscription : 26/03/2023
T1 - Kenaz
Dim 26 Mar - 16:20
Cours. Vite. plus vite. plus vite. plus loin, cours, cours, cours, encore, pas d’arrêts, pas de pauses, pas de peur, je n’ai pas peur, pas peur, pas peur
Panique
Atmostphère lourde, poitrine lourde, pas lourds, chaleur écrasante, j’étouffe. La lumière m’éblouis, la sable me brûle la plante des pieds, ma gorge est sèche et je vacille. À genoux dans le sable, je contemple l’étendue du Sahara. Les dunes se succèdent à l’infini, le vent hurle et mes boyaux se tordent d’angoisse.
Je suis tellement seule. De mes yeux irrités par le vent, une unique larme se forme, roule, s’aventure sur mes joues. Ma chance de boire une goutte d’eau, une miette d’espoir peut-être, s’évapore quand je laisse ma langue toucher la commissure de mes lèvres. Il ne me reste qu’un gout de sel de mon désespoir.
Je resserre mon foulard autour de moi, pousse sur mes mains et me relève. Il faut avancer. Un pas. Incapable d’en faire plus, je baisse mes yeux sur mes genoux. Mon pantalon est troué, mes poils grillés, ma peau cloquée.
La douleur me rend les sens que j’avais perdus. Je vide le contenu de mon sac : il ne me reste qu’un couteau mal aiguisé, une gourde trouée, le livre de maman et ce tissu déchiré volé à un groupe de Touaregs. Je l’utilise pour attacher mes possessions entre elles et relève les yeux sur l’horizon. Je ne trouverai pas d’abri avant la nuit. Je ne vivrai peut-être pas jusque-là, pas si je m’épuise à fuir sans réfléchir ni me reposer. Je me force à respirer, mes poumons se gonflent de l’air brulant du désert, mes narines vont exploser, ma gorge se serre, mais mon cœur se calme un peu.
Je me glisse dans le sac : mes genoux collés à ma poitrine, j’y rentre jusqu’aux épaules. Pour protéger mon visage, j’emballe ma tête dans le tissu bleu et la dépose sur le livre. Je pris pour que sa couverture en cuir ne brûle pas, et j’attends. Ici, au fond du néant, le temps semble s’être arrêté. Le soleil est immobile et poursuis inlassablement sa cruelle destruction, alors même qu’il ne reste rien. La vie s’est éteinte, s’eau s’est envolée, même les pierres sont réduites en cendre et tout brûle, sauf la flamme de l’espoir.
Au milieu du brasier, mes souvenirs remontent doucement, et je laisse mes pensées me ramener à mon enfance. Ma grand-mère et ma mère se succèdent, leurs voix déformées par mon esprit délirant. Les courses dans la forêt, les histoires millénaires, l’apprentissage de la magie. Mon enfance solitaire au milieu des arbres. Je ressens toute la gratitude de la protection qu’elles m’ont offerte.
Je me souviens la fierté dans ma poitrine qui naissait de leur sourires. Je connais tous les livres, tous les sorts, toutes les plantes. J’apprenais vite, à leur diligence. Passionnée, appliquée, je suivais leur trace et avançait plus vite qu’elles à mon âge. Malgré ça, je n’ai jamais su maîtriser la magie. Je ne pouvais qu’observer avec admiration les talents de mes aïeux, en sachant j’étais une tache dans la généalogie. Je ressens à nouveau ma culpabilité, leur déception graduelle, leur amour qui fanait, leur violence à mon égard. La honte, la tristesse, la peur.
Je trace sur mon cœur tour à tour les runes Sōwilō, Lögr et Naudiz. Le soleil, l’eau, le besoin. J’essaie de créer une invocation, je récite celles qu’on m’a apprises. Encore et encore, en revivant mon enfance, puis mon adolescence, je récite les runes comme les livres me l’ont enseigné. Je me rappelle des sorcières dont la magie s’est réveillée tardivement, Susannah Martin, dix-sept ans, Rebecca Nurse, vingt ans, Sarah Wildes, vingt-deux ans.
Mais j’en ai quarante-six aujourd’hui. J’ai été bannie depuis longtemps, j’ai brisée ma lignée. Je suis reniée. J’aurais pu vivre une vie paisible au milieu des Telluriques, mais après vingt ans à leur côté, à parcourir les continents pour trouver ma place, je ne peux que me rendre à l’évidence. Je n’ai pas ma place parmi eux. Comment pourrais-je renoncer à ce monde qui est le mien ?
Au milieu de mes questionnements, je ressens pour la première fois un sentiment qui ne m’avait jamais effleuré auparavant. La volonté de me lever et de hurler. Le désir que le monde éprouve ma souffrance. Rage
Je me remémore mon isolement, ma peur, leurs actes et leur mépris, et la fureur me saisit. Cela fait vingt-et-un ans que je n’ai plus de liens avec la communauté. Vingt-et-un ans que j’erre. Vingt-et-un an que je souffre. Je pense à toutes les magiciennes dont les pouvoirs ne se sont pas réveillés autour du monde. Elles méritent d’être vengées. Nous méritons notre revanche. Sur mon cœur brille un symbole que je n’ai pas tracé de mon index. Kenaz. La torche. La rune de la nuit, la rune de la connaissance, et à partir de ce soir, ma rune.
Je sens l’énergie sillonner de nouveaux chemins dans mon corps et soudain le sable s’écarte de moi dans une explosion. Je sais, de par les livres que j’ai lu, qu’une explosion de puissance telle que celle-ci n’a jamais existé auparavant. Un afflux d’adrénaline me parcours. Ma magie. Mais je n’oublie pas mes sœurs reniées, je n’oublie pas ma promesse silencieuse. Je saisis mon couteau, et sur mon cou, je grave Kenaz. Ma promesse envers les sorcières abandonnées sera tenue.
C’est ici, au milieu du désert, que mon histoire commence. Le monde se souviendra des sorcières abandonnées.
Le monde connaîtra mon nom.
Panique
Atmostphère lourde, poitrine lourde, pas lourds, chaleur écrasante, j’étouffe. La lumière m’éblouis, la sable me brûle la plante des pieds, ma gorge est sèche et je vacille. À genoux dans le sable, je contemple l’étendue du Sahara. Les dunes se succèdent à l’infini, le vent hurle et mes boyaux se tordent d’angoisse.
Je suis tellement seule. De mes yeux irrités par le vent, une unique larme se forme, roule, s’aventure sur mes joues. Ma chance de boire une goutte d’eau, une miette d’espoir peut-être, s’évapore quand je laisse ma langue toucher la commissure de mes lèvres. Il ne me reste qu’un gout de sel de mon désespoir.
Je resserre mon foulard autour de moi, pousse sur mes mains et me relève. Il faut avancer. Un pas. Incapable d’en faire plus, je baisse mes yeux sur mes genoux. Mon pantalon est troué, mes poils grillés, ma peau cloquée.
La douleur me rend les sens que j’avais perdus. Je vide le contenu de mon sac : il ne me reste qu’un couteau mal aiguisé, une gourde trouée, le livre de maman et ce tissu déchiré volé à un groupe de Touaregs. Je l’utilise pour attacher mes possessions entre elles et relève les yeux sur l’horizon. Je ne trouverai pas d’abri avant la nuit. Je ne vivrai peut-être pas jusque-là, pas si je m’épuise à fuir sans réfléchir ni me reposer. Je me force à respirer, mes poumons se gonflent de l’air brulant du désert, mes narines vont exploser, ma gorge se serre, mais mon cœur se calme un peu.
Je me glisse dans le sac : mes genoux collés à ma poitrine, j’y rentre jusqu’aux épaules. Pour protéger mon visage, j’emballe ma tête dans le tissu bleu et la dépose sur le livre. Je pris pour que sa couverture en cuir ne brûle pas, et j’attends. Ici, au fond du néant, le temps semble s’être arrêté. Le soleil est immobile et poursuis inlassablement sa cruelle destruction, alors même qu’il ne reste rien. La vie s’est éteinte, s’eau s’est envolée, même les pierres sont réduites en cendre et tout brûle, sauf la flamme de l’espoir.
Au milieu du brasier, mes souvenirs remontent doucement, et je laisse mes pensées me ramener à mon enfance. Ma grand-mère et ma mère se succèdent, leurs voix déformées par mon esprit délirant. Les courses dans la forêt, les histoires millénaires, l’apprentissage de la magie. Mon enfance solitaire au milieu des arbres. Je ressens toute la gratitude de la protection qu’elles m’ont offerte.
Je me souviens la fierté dans ma poitrine qui naissait de leur sourires. Je connais tous les livres, tous les sorts, toutes les plantes. J’apprenais vite, à leur diligence. Passionnée, appliquée, je suivais leur trace et avançait plus vite qu’elles à mon âge. Malgré ça, je n’ai jamais su maîtriser la magie. Je ne pouvais qu’observer avec admiration les talents de mes aïeux, en sachant j’étais une tache dans la généalogie. Je ressens à nouveau ma culpabilité, leur déception graduelle, leur amour qui fanait, leur violence à mon égard. La honte, la tristesse, la peur.
Je trace sur mon cœur tour à tour les runes Sōwilō, Lögr et Naudiz. Le soleil, l’eau, le besoin. J’essaie de créer une invocation, je récite celles qu’on m’a apprises. Encore et encore, en revivant mon enfance, puis mon adolescence, je récite les runes comme les livres me l’ont enseigné. Je me rappelle des sorcières dont la magie s’est réveillée tardivement, Susannah Martin, dix-sept ans, Rebecca Nurse, vingt ans, Sarah Wildes, vingt-deux ans.
Mais j’en ai quarante-six aujourd’hui. J’ai été bannie depuis longtemps, j’ai brisée ma lignée. Je suis reniée. J’aurais pu vivre une vie paisible au milieu des Telluriques, mais après vingt ans à leur côté, à parcourir les continents pour trouver ma place, je ne peux que me rendre à l’évidence. Je n’ai pas ma place parmi eux. Comment pourrais-je renoncer à ce monde qui est le mien ?
Au milieu de mes questionnements, je ressens pour la première fois un sentiment qui ne m’avait jamais effleuré auparavant. La volonté de me lever et de hurler. Le désir que le monde éprouve ma souffrance. Rage
Je me remémore mon isolement, ma peur, leurs actes et leur mépris, et la fureur me saisit. Cela fait vingt-et-un ans que je n’ai plus de liens avec la communauté. Vingt-et-un ans que j’erre. Vingt-et-un an que je souffre. Je pense à toutes les magiciennes dont les pouvoirs ne se sont pas réveillés autour du monde. Elles méritent d’être vengées. Nous méritons notre revanche. Sur mon cœur brille un symbole que je n’ai pas tracé de mon index. Kenaz. La torche. La rune de la nuit, la rune de la connaissance, et à partir de ce soir, ma rune.
Je sens l’énergie sillonner de nouveaux chemins dans mon corps et soudain le sable s’écarte de moi dans une explosion. Je sais, de par les livres que j’ai lu, qu’une explosion de puissance telle que celle-ci n’a jamais existé auparavant. Un afflux d’adrénaline me parcours. Ma magie. Mais je n’oublie pas mes sœurs reniées, je n’oublie pas ma promesse silencieuse. Je saisis mon couteau, et sur mon cou, je grave Kenaz. Ma promesse envers les sorcières abandonnées sera tenue.
C’est ici, au milieu du désert, que mon histoire commence. Le monde se souviendra des sorcières abandonnées.
Le monde connaîtra mon nom.
Céhah, Ratonmalin, ninja-janine et mllegaffie aiment ce message
- Céhah
- Messages : 94
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Localisation : Loire-Atlantique
Re: T1 - Kenaz
Lun 27 Mar - 2:44
Honnêtement, je sais pas trop quoi dire d'autre que bravo. Il se passe clairement quelque-chose, c'est assez poignant. J'ai beaucoup aimé ce texte et son ambiance, mais je vois pas trop ce que je pourrais dire d'autre dessus, désolé
Romane aime ce message
- Romane
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Date d'inscription : 26/03/2023
Re: T1 - Kenaz
Lun 27 Mar - 12:20
Merci beaucoup Céhah ! C'est un très gentil message ♡ pas besoin d'analyse à chaque fois
Je voulais surtout me remettre à l'écriture donc j'ai atteint mon but avec ce texte ! Pour les prochains je préciserai sur quoi je veux me concentrer (suspense, émotions, style...) ça sera plus facile de commenter ! Merci d'avoir pris le temps de me lire ^^
Je voulais surtout me remettre à l'écriture donc j'ai atteint mon but avec ce texte ! Pour les prochains je préciserai sur quoi je veux me concentrer (suspense, émotions, style...) ça sera plus facile de commenter ! Merci d'avoir pris le temps de me lire ^^
Céhah aime ce message
- Ratonmalin
- Messages : 10
Date d'inscription : 29/01/2023
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Localisation : Paris
Re: T1 - Kenaz
Ven 31 Mar - 19:54
Super ton texte, surtout la fin qui m'a bien plu !
Certaines phrases au début de ton texte (les 3 premiers paragraphes) m'ont d'abord étonnés, avec le rythme saccadé, les répétitions, et l'absence de ponctuation. Peut-être que ces phrases mériteraient d'être un peu plus rédigées ? Sans pour autant briser le rythme haché Je ne sais pas si je suis claire, désolé !
Certaines phrases au début de ton texte (les 3 premiers paragraphes) m'ont d'abord étonnés, avec le rythme saccadé, les répétitions, et l'absence de ponctuation. Peut-être que ces phrases mériteraient d'être un peu plus rédigées ? Sans pour autant briser le rythme haché Je ne sais pas si je suis claire, désolé !
- Romane
- Messages : 8
Date d'inscription : 26/03/2023
Re: T1 - Kenaz
Ven 31 Mar - 21:43
Renardgris a écrit:
(les 3 premiers paragraphes) m'ont d'abord étonnés, avec le rythme saccadé, les répétitions, et l'absence de ponctuation
Coucou Renard gris !
Tu es super claire, j'ai un peu expérimenté haha
Mais c'est vrai que ça fait pas très littéraire ! Je ne sais pas si je ferais la même chose dans un roman... mais je pense que ça peut donner du rythme si c'est bien fait
En tout cas je prends en compte ! Merci beaucoup pour ton retour !
Ratonmalin aime ce message
Re: T1 - Kenaz
Ven 14 Avr - 15:42
Heya !
Texte super cool qui donne vraiment envie de lire la suite et son histoire !
Continue comme ça !
Pilou
Texte super cool qui donne vraiment envie de lire la suite et son histoire !
Continue comme ça !
Pilou
Re: T1 - Kenaz
Ven 14 Avr - 15:42
Vraiment bravo pour ce texte. Il monte en puissance jusqu'à la fin, le rythme est super, le vocabulaire aussi, l'univers semble aussi très cool. Je n'ai rien à te reprocher à première vue, bravo
- Romane
- Messages : 8
Date d'inscription : 26/03/2023
Re: T1 - Kenaz
Ven 14 Avr - 16:56
Merci Yuni Stark et Christelle !
Trop trop gentils ! Je n'ai pas pu être là pour le live mais je regarderai le replay ce soir <3 Merci merci les miettes
Trop trop gentils ! Je n'ai pas pu être là pour le live mais je regarderai le replay ce soir <3 Merci merci les miettes
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