L'elfe aux cheveux mauves

Sous une lumière fantomatique, Laura restait prostrée sur sa chaise, le regard navigant entre l’écran noir de son ordinateur et le plafond blanc de sa chambre sans percevoir la moindre étincelle, le moindre monde à explorer avec son esprit. Même la poussière qui dansait dans les rayons du projecteur LED, et qui remplissait la pièce comme dans une boule à neige, ne parvenait guère à lui mettre des étoiles plein les yeux.

Pourtant, ses figurines, tous ces minuscules goodies de tout sorte qui nichaient dans son espace le plus intime comme d’adorables parasites, s’activaient autour d’elle pour lui souffler des idées. Le petit chat en plastique se blottissait contre sa poitrine pour la réconforter. La petite sorcière brodée en crochet, à califourchon sur son stylo magique, volait autour de la bibliothèque à la recherche du moindre livre, de la moindre image susceptible de lui rappeler de vagues souvenirs d’enfance. Affalé dans un coin de la pièce, le gros lapin en peluche, dont les yeux aussi allongés que ses oreilles reflétaient tout sa sagesse, ne cessait de lui répéter de respecter les étapes fondamentales pour sa réflexion et d’accueillir la moindre petite idée qui lui traverserait l’esprit, non sans vérifier sa pertinence comme on vérifie l’identité d’un corps étranger. Mais, rien à faire : Laura était si perturbée par ses tracas de la vie réelle qu’il ne semblait plus avoir de place dans son bureau pour recevoir ses abstractions imaginaires.

Au bout d’un moment qui lui paraissait une éternité, Laura se leva, déposa son chat en peluche sur le bureau et s’affala sur son lit de camp en poussant un profond soupir. Elle ferma les yeux, non pas qu’ils étaient irrités par toute cette poussière irrésistible, mais tout simplement pour s’évader ou s’oublier. En tout cas, s’autoriser un retour à la surface temporaire au milieu de l’océan de sa mélancolie.


– Pourquoi ne veux-tu pas aller au bout de cette idée ? demanda le chat qui restait toujours assis sur le bureau. Je suis sûr qu’elle plairait à tous tes fans et, en plus, elle semble respecter l’univers de cette saga que tu adores.

– Non, je suis désolée, Félix, répondit Laura. À première vue, c’est vrai que cette histoire paraît excitante, mais quand même… il y a des choses qui ne collent pas. Qui n’ont pas l’air logique.

– Et pourquoi ne pas les écrire pour pouvoir réellement les juger comme incompatibles ? dit Bunny, le gros lapin. Nous savons que tu as subi des critiques négatives sur tes derniers récits, mais…

– Mais justement, Bunny, s’écria Laura. À quoi bon continuer à réfléchir pendant des heures, à tourner les intrigues dans tous les sens, à écrire et à corriger encore et encore les mêmes paragraphes si tout le monde les considère comme clichés ou trop décalés par rapport à ce qu’ils entendent ? À force que l’on met en doute mes idées, j’ai l’impression que plus aucune ne m’inspire réellement.

Elle ferma les yeux pour dissimuler à ses jouets vivants, incrédules, les larmes qui commençaient doucement à monter. Elle bredouilla plus pour elle-même que ses compagnons :

– Ah, si seulement je pouvais rencontrer un personnage qui a un background très riche et, pourtant, si original. Si seulement je pouvais avoir auprès de moi une personne qui me correspond et qui saurait me soutenir et me guider dans les récits que je veux partager…

Quelques étages plus bas, elle entendit quelques hurlements inaudibles, puis un claquement de porte qui la ramena brusquement à la réalité. Ça devait être encore sa voisine, cette vieille folle qui piquait une crise pour des conflits réels ou sortis tout droit de son esprit. Pourtant, une personne bien réelle avait dû la froisser car elle entendait des pas lourds gravir l’escalier. Une personne qui montait à l’étage, mais où ? Chez elle ? Au grenier ?

En tout cas, à cause de la perméabilité des murs, Laura percevait faiblement quelques sanglots qui devait provenir de cet inconnu, ainsi que des marmonnements dans un langage étrange.

On frappa à sa porte. Les goodies sursautèrent.

– Qui ça peut être ? lança le chat en bondissant sur la moquette

– Je ne sais pas, mais cette personne a l’air en détresse, dit Laura en se redressant. Je vais aller jeter un œil pour voir ce qu’il se passe.

– Non, arrête, Laura, répliqua Bunny qui, malgré ses efforts, ne pouvait guère se lever. Cela ne te concerne absolument pas. Et, si jamais tu te faisais agresser par cet inconnu ?

– T’inquiète, Bunny, je saurai me défendre.

Malgré les protestations de ses amis de plastique et de poils de peluche, Laura s’approcha de la porte d’entrée de son appartement, l’esprit en alerte pour faire face à la moindre menace.

Devant elle, se tenait un elfe pareil à tant de modèles contemporains qu’elle avait déjà observé dans les conventions ou les images postées sur les forums numériques. L’être en question était aussi grand qu’elle, avec des oreilles pointues qui émergeaient d’une chevelure de couleur mauve, bouclée et coupée à la hauteur des épaules. Il portait une armure légère en métal au-dessus d’une tunique et d’une paire de braies qui arboraient des couleurs pastel de différents tons comme un kaléidoscope. En regardant son visage de plus près, Laura se demanda si elle n’avait pas plutôt affaire à une jeune femme car ses traits étaient fins, juvéniles, dépourvu de poils et empreints d’une certaine douceur, malheureusement ternie par une souffrance qui émanait des quelques larmes perlant sur ses joues.

– Bonjour, dit Laura sur un ton cordial, mais en restant méfiante. Qu’est-ce qui vous arrive ? Je peux vous aider ?
Bien avant la réponse de son interlocutrice, la jeune autrice trouva son cosplay très convaincant, beaucoup plus inspiré que ses propres créations. Elle se demanda quel personnage cette jeune femme incarnait ; il lui semblait ne l’avoir jamais vu dans aucun média.

– Je suis perdue, répondit l’elfe dans un souffle frais. J’ai besoin de quelqu’un pour raconter mon histoire, mais ma Créatrice a décidé de me laisser tomber.

– Comment ça ? dit Laura, éberluée.

– En retournant dans mon univers, j’ai senti votre détresse et votre besoin de créer. Je suis convaincue que vous avez, vous-aussi, la main heureuse et digne de manier la Plume Magique. Je pense que nous avons, toutes les deux, le besoin de prouver notre valeur et de nous accomplir… si seulement nous pouvions trouver une compagne qui soit à notre hauteur.

– Je… je ne comprends pas.

Laura commençait à frissonner. Elle sentait que cette personne n’était pas mal intentionnée mais, malgré sa voix douce et profonde, ce cosplay lui paraissait, tout à coup, trop inspiré pour ne susciter qu’une simple admiration.

– Je vous en prie, prenez vite votre décision, lança l’elfe. Regardez comme le temps presse…

Elle tendit ses mains vers la jeune autrice. Celle-ci constata, avec horreur, qu’un liquide sombre et épais s’écoulait de ses ongles à priori rongés. Elle pensa, naturellement, à du sang, mais ce liquide était trop noir et trop brillant. Une idée la terrorisa…

Et si c’était de l’encre ?
Décidément, ce cosplay allait trop loin…

Hello, bravo pour ton texte. J'aime beaucoup ton idée de texte, très méta. Mais j'aurais bien aimé en savoir un peu plus sur cette elfe. La scène d'exposition de l'autrice est bonne, on se fait facilement une idée du caractère de la personne en question.
Au niveau de la forme, il y a beaucoup de répétitions et d'utilisation d'adverbes qui alourdissent le propos. Par exemple :
"En regardant son visage de plus près, Laura se demande si elle n’avait pas plutôt affaire à une jeune femme car ses traits étaient fins, juvéniles, dépourvu de poils et empreints d’une certaine douceur, malheureusement ternie par une souffrance qui émanait des quelques larmes perlant sur ses joues."
Je pense qu'il y a moyen de faire plus léger et plus fluide.

Bravo

Bonjour Ginevra

Merci pour ta lecture et ton retour. Il est vrai qu'il s'agit d'un premier jet que je n'ai pas eu le temps de peaufiner. Mais l'essentiel pour moi, c'était la vraisemblance de la scène dans ce contexte de conte (c'est ce qui me handicape depuis un certain temps). Je pense que ça va m'encourager à me lancer dans le premier jet du roman entier

Hello ! bravo pour ton texte ! l'idée est bonne, le vocabulaire est bon, et on prend plaisir à lire le texte. Juste un souci : les phrases trop longues/avec trop d'informations/pas assez entrecoupées de phrases courtes.
Aussi, la consigne n'est pas vraiment respectée selon moi.

Merci pour ta participation !