Une poupée de porcelaine

— Je vais mourir, papa ?

Elle est si jeune et pourtant son ton est si ferme. Paniqué, j’essaie de rassembler les morceaux de ma fille sur le bord de la route. Sereine, elle a déjà compris ce que je refuse d’admettre.

— Mais non, ma chérie ! Mais non ! Ne dis pas de bêtises… Ça va aller…

Des milliers d’éclats de verre scintillent sur l’asphalte. La gomme des pneus rend une odeur de brûlé. L’autoradio crache ses derniers décibels. Tout est confus dans mon esprit. Louise pleure en silence. Elle a été éjectée de la voiture à cause du choc. À genoux, je la serre contre moi. Des loupiottes de warnings clignotent autour de nous. Je ne sais même pas si quelqu’un a appelé les secours. Sourd. Aveugle. J’essaie juste de recoller les morceaux de Louise. Son bras. Sa jambe. Ses côtes. Son autre jambe. Elle saigne beaucoup. Je hurle de douleur. Mes mains compriment une plaie béante. Sur les pans de sa robe à fleurs se mélangent du gravier et son sang. Ses yeux ne disent plus rien. Je hurle encore plus fort. Elle ne m’en veut même pas.

— Où est maman ? demande Louise d’une voix faible. Maman ?

Elle tourne la tête à droite, à gauche. Un voile s’est posé sur ses pupilles. Sa voix est presque éteinte. Dire qu’elle chantait si bien ce matin pendant son cours de piano…

— Maman ? Où tu es, maman ? Mam…

De violents spasmes secouent son corps. Ses joues se couvrent de gros sanglots.

— Maman est à la maison, ma chérie… Je suis là. Ne t’endors surtout pas, Louise. Reste avec moi !

Mais Louise n’entend plus rien. Sa main valide agrippe ma chemise et la tord à en faire péter les boutons.

— Maman !!! Je… ve… mam…


… une enfant blessée oui… Je ne sais pas si le monsieur est blessé lui aussi… Où nous sommes ? Euh… C’est difficile à dire… Attendez. Nous sommes sur une nationale… Comment ? Non, je ne quitte pas.


Ma chemise est toute froissée.

— Reste avec moi, chérie… Reste avec moi…

D’un mouvement d’épaule, je repousse une femme venue nous aider. Une bouillie de caillots et de bris de glace englue mes mains qui ne compriment plus rien. Un dernier hoquet soulève ma petite poupée de porcelaine. Il y a trop de morceaux, je n’arriverai jamais à tout recoller. Il y a des éclats partout. Je te demande pardon, Louise. Il y a trop de morceaux. Je n’arriverai jamais à te recoller.

Ouah, court et percutant, en fallait-il plus ? Le déni déchirant du père devant sa "poupée de porcelaine", l'acceptation de la petite fille qui malgré tout ne reverra pas sa mère... Et cette fin, où il a l'air de se sentir seul au monde alors qu'il y a des gens, et où il n'a pas encore réalisé...
On s'imagine les morceaux éparpillés de Louise, malgré tout, ta description ne rend pas ça gore du tout (en tout cas pour ma part), juste profondément triste... Bravo !

Bouleversant, la comparaison de la petite fille et d'une poupée brisée est saisissante. L'émotion du papa est déchirante, bravo pour ce texte !

Très fort ! Je rejoins les précédents commentaires, le parallèle entre Louise et la poupée est bien trouvé, et ça donne un texte qui nous attrape et nous met au cœur de l'action, c'est efficace ! Bravo !

J'ai juste une réserve sur une phrase "Elle ne m’en veut même pas.", je pense qu'il faudrait plus le montrer plutôt qu'il se le dise à lui-même. Genre la petite lui sourit, caresse sa joue ou un truc du style.

Ça c'est un texte qui te met un coup de poing dans l'estomac! C'est tellement bien écrit, j'en ai le coeur encore serré. Magnifique malgré l'horreur que tu décris. Tu es tellement doué ! Énorme bravo à toi

Aline a écrit:Très fort ! Je rejoins les précédents commentaires, le parallèle entre Louise et la poupée est bien trouvé, et ça donne un texte qui nous attrape et nous met au cœur de l'action, c'est efficace ! Bravo !

J'ai juste une réserve sur une phrase "Elle ne m’en veut même pas.", je pense qu'il faudrait plus le montrer plutôt qu'il se le dise à lui-même. Genre la petite lui sourit, caresse sa joue ou un truc du style.

J'avoue que ce n'est pas la phrase dont je suis le fier dans le texte. Je voulais exprimer l'idée que tout se passe tellement vite que la pauvre Louise n'a même pas le temps de se mettre en colère et d'en vouloir à son père. (Sous-entendu qu'il est fautif dans l'accident...) J'ai manqué de temps malheureusement pour développer cette idée de manière plus judicieuse. Mais c'est bien vu de ta part

Coucou Rosa !

Wow c'est très touchant comme texte, poignant en effet. Les mots sont efficaces, on arrive très bien à s'imaginer la scène et ressentir les émotions. Franchement bravo

Je suis traumatisée^^ Je suis traumatisée^^
C'est une vraie poupée de porcelaine, hein? La petite fille, elle est pas morte. C'est juste un rêve.
Bon c'est super bien écrit et l'idée et géniale. Mais je suis traumatisée, maintenant.

Un texte poignant, merci pour cette idée ! Perso, en tant que maman d'un petit garçon de bientôt trois ans, j'ai trouvé le texte passablement gore lol mais c'est grâce à ta force de description que j'ai trouvé bien dosée. Ni trop ni trop peu. ça permet d'imaginer les grands traits de la scène mais de laisser libre cours à sa propre interprétation ensuite (et évidemment moi je suis allée dans le trash direct xD).

Merci pour ce texte et bravo ^^

Waoh !! Que dire ! Déjà si on voulait de l'émotion, on est servi ! Ca m'a presque mis les larmes aux yeux. Et je pense que ce texte en audio, avec les voix des personnages et un bon sound design ce serait vraiment super émouvant. (Un très bon spot de prévention routière x)) C'est super bien écrit et j'aime beaucoup ton style et la façon dont tu décris (ni trop, ni pas assez). Tout est très bien dosé et pour le temps qu'on a eu pour faire l'exercice je dis vraiment un grand bravo à toi ! ^^
La métaphore de la poupée de porcelaine est idée génial qui permet de nous figurer la scène en occultant l'aspect trop gore et c'est vraiment bien trouvé !

Mon dieu ! Je crois que je n'ai pas pu retenir une petite larme... Bravo !
Je crois que la fin m'a achevé avec le coup de la poupée de porcelaine à recoller.
Une image tellement cruelle et réaliste...

Salut,
Je ne m'attendais pas à un texte aussi court. Mais je dois dire qu'il fonctionne plutôt bien. On sent la détresse de ce père et une certaine forme de déni quand il essaye de recoller les morceaux de sa fille. Un peu, aussi, probablement, comme s'il avait tourné la carte.
Et effectivement, on s'imagine bien la scène avec les gens autour qui essaye de porter secours et lui qui est tellement choqué qu'il s'en rend à peine compte.

Bravo pour ton texte

Rosario_gnd a écrit:

Aline a écrit:Très fort ! Je rejoins les précédents commentaires, le parallèle entre Louise et la poupée est bien trouvé, et ça donne un texte qui nous attrape et nous met au cœur de l'action, c'est efficace ! Bravo !

J'ai juste une réserve sur une phrase "Elle ne m’en veut même pas.", je pense qu'il faudrait plus le montrer plutôt qu'il se le dise à lui-même. Genre la petite lui sourit, caresse sa joue ou un truc du style.

J'avoue que ce n'est pas la phrase dont je suis le fier dans le texte. Je voulais exprimer l'idée que tout se passe tellement vite que la pauvre Louise n'a même pas le temps de se mettre en colère et d'en vouloir à son père. (Sous-entendu qu'il est fautif dans l'accident...) J'ai manqué de temps malheureusement pour développer cette idée de manière plus judicieuse. Mais c'est bien vu de ta part

On est d'accord 1h30 c'est chaud haha. Mais tu as fait un super boulot !

J'adore comment tu arrives à nous faire vivre la mort d'une poupée comme celle d'une véritable humaine ! On se rend bien compte au vocabulaire et autre titre choisi que c'est une poupée et pourtant, comme dans le texte tu parles de "sang", de "douleur", ect... On doute beaucoup.
Le narrateur n'est pas du tout fiable , mais du coup ça fait son effet !!!

Wow un texte poignant : les émotions sont très bien retranscrites et transmises. Je pense que le moment où Louise demande sa mère appuie l’attache que l’on porte à la petite fille, ce qui nous fait partager l’émotion du père. Bravo ! Tu as fait passer une scène gore pour une scène totalement différente mais l’essence reste pareil quand même.

Mimisth a écrit:J'adore comment tu arrives à nous faire vivre la mort d'une poupée comme celle d'une véritable humaine ! On se rend bien compte au vocabulaire et autre titre choisi que c'est une poupée et pourtant, comme dans le texte tu parles de "sang", de "douleur", ect... On doute beaucoup.
Le narrateur n'est pas du tout fiable , mais du coup ça fait son effet !!!

Nan, nan, la poupée est une image. Louise est une vraie petite fille. Et elle meurt sur le bord de la route.

Court et super efficace ! Incroyable !
J'ai été choqué dès que tu as parlé des morceaux de la fille dans la 3ème phrase, je ne m'attendais tellement pas à ça !
J'adore ce côté perdu qu'a le père, c'est très bien décrit.

Vers la fin, je n'ai pas compris qui disait le texte en italique, des personnes arrivant sur la scène ?
Et le coup de la poupée de porcelaine m'a complètement perturbée ! D'un coup, je n'avais plus rien compris au texte xD Mais en lisant les commentaires, j'ai compris à nouveau

Hello ! Bravo pour ton texte ! Je regrette que tu n'aies pas eu plus de temps, mais c'est vraiment très bien. La scène est bien racontée, tu en fais juste ce qu'il faut et j'aime l'originalité de la poupée. En plus, c'est rythmé. Bien joué.
Merci pour ta participation !

Bonjour

Bravo pour ton travail j'ai beaucoup aimé  ton texte. j'ai tout de suite réussis à me mettre dans la scène, l'émotion et la sensation de désespoir et de dénis du père est bien retranscrit.

je suis encore à me demander si c'est une poupée cassé ou une petite fille qui va mourir (peut être que je suis moi-même dans le   dénis)

Félicitation