Calypso et Orion

Un mouvement presque imperceptible dans son dos dressa les poils de sa nuque. Sans perdre une seconde, Calypso se laissa tomber tout en pivotant afin de faire face à son assaillant. Grâce à ce réflexe elle esquiva le coup mortel qui se contenta de trancher la pointe de sa tresse brune. D’un geste elle tira un long poignard de sa ceinture puis roula sur le côté pour avoir un meilleur angle.

- Orion ! Appela-t-elle.

Une boule de fourrure sauta sur son épaule pour s’en servir comme d’un tremplin. Orion, son capucin atterrit sur la tête de l’homme qui venait de l’attaquer. Il commença par lui tirer les oreilles tandis que l’homme perturbé par le petit animal faisait des mouvements brusques de la tête pour le déloger. Orion attrapa ensuite les cheveux mi-long du guerrier et les tira en arrière avec force pour le déséquilibrer. Pendant ce temps Calypso, toujours en position, son poignard à la main, observait avec amusement, un petit sourire aux lèvres, l’homme s’agiter dans tous les sens tandis que son capucin remontait plus haut sur sa tête pour l’aveugler en lui mettant les pattes dans les yeux.

Seulement, la patience du guerrier avait des limites. Il en avait assez de ce petit jeu. De sa main libre il tâtonna sur son crâne afin de trouver le petit primate qui le tournait en ridicule. Sa grosse main saisit le petit corps et l’écarta violemment de son visage. Le capucin se tortillait entre ses doigts pour se libérer mais rien y faisait, il avait une poigne de fer. Calypso fronça les sourcils. Il était temps pour elle d’entrer en scène. Alors qu’Orion dans un ultime geste pour se libérer de l’étreinte plantait ses dents dans la main du guerrier assassin qui le lâcha aussitôt en poussant un grognement, Calypso fonça vers lui, la lame de sa dague en avant.

L’homme qui était beaucoup plus grand qu’elle la dominait largement, il n’en aurait fait qu’une bouchée si elle n’avait pas été si agile. Voyant la jeune fille lui foncer dessus, il se désintéressa du petit singe qu’il venait de lâcher, il fléchi légèrement les genoux et se prépara à encaisser le choc. En arrivant à sa hauteur, Calypso feinta en se décalant brusquement sur la droite, puis elle prit appui sur le genou de l’homme et s’en servit pour grimper sur ses épaules. Utilisant ses jambes elle créa un étau autour du cou de l’homme. Surpris par la prise, l’homme lâcha son épée et porta ses deux mains à sa gorge pour se libérer du piège. Calypso était peut-être plus rapide et agile que lui, mais il était néanmoins beaucoup plus puissant qu’elle. A la force de ses bras, l’homme parvint à suffisamment relâcher la pression de l’étau sur ses deux carotides. Son cerveau de nouveau oxygéné, il saisit de sa poigne de fer la tresse de la jeune fille qui était pendu à son cou contre son torse et la tira violemment en arrière, l’obligeant à relâcher complètement sa prise. Elle s’appuya sur le large torse de l’assassin pour faire une pirouette en arrière et s’éloigna de lui. Orion profita de se moment pour retourner sur l’épaule de sa maitresse.

Pendant que l’homme ramassait son épée Calypso reprit son souffle et sortie la dague qu’elle avait rangé juste avant de faire sa prise. Son adversaire était vraiment fort. Elle utilisa ces quelques secondes de répit pour le détailler davantage. Grand et très large d’épaule, il ne semblait être fait que de muscles. Le torse était couvert d’une cuirasse tout en cuir mêlé de métal rutilant, elle remarqua alors l’écusson représentant un lion terrassant un aigle sur sa poitrine. Il était donc sous les ordres de la Reine.

L’homme rassembla ses cheveux brun mi long avec une lanière de cuire et lorsqu’il fut prêt frappa férocement son poing contre sa poitrine. Calypso leva un sourcil, dubitative. Il compte m’intimider en faisant ça ? Songea-t-elle en souriant intérieurement. Il n’avait vraiment aucune idée de qui elle était. Elle ne comptait pas se laisser faire ainsi. Elle se redressa et lui fit face en se mettant en garde. Ca y est, elle était prête, le vrai combat pouvait commencer !

Elle fit quelques pas sur la droite en arc de cercle, l’assassin de la Reine en face d’elle fit de même. Tous deux savaient que dorénavant c’était sérieux et chaque coups portés seraient mortels. Tout irait très vite. Ils continuèrent de se jauger du regard pendant quelques secondes puis l’homme, la bouche tordu en un mauvais rictus leva sa lame et chargea vers la jeune femme en poussant un cri qui se voulait effrayant. Calypso recula son pied droit, fléchi les genoux légèrement et remonta sa garde, la lame de sa dague en avant.

D’un geste de l’épaule elle signala a Orion qu’il était temps pour lui de se trouver un autre perchoir, il descendit aussitôt de son épaule et alla se jucher sur l’une des branches basses des arbres se trouvant à une dizaine de pas derrière eux.

L’homme fut sur elle en quelques secondes, il brandit son épée et asséna un premier coup. Calypso n’eut aucun mal à l’éviter, elle se laissa glisser au sol et se rapprocha de lui avec une roulade. Sa lame dessina un arc de cercle et vint trancher la chair et le tendon du genou dans un sens et ceux de la cheville dans l’autre. L’homme poussa un cri avant de s’écrouler lourdement au sol sur le genou, sa jambe n’étant plus capable de le retenir. Dans le but de se mettre en sécurité, il fit de grand geste avec son épée pour l’éloigner. Mais la douleur embrouillait son cerveau et rendait ses mouvements brouillons. Elle n’eut aucun mal à éviter les moulinets de la lame et se positionna dans le dos de l’assassin.

Se redressant de toute sa hauteur, elle avait gagné. Elle le savait, mais plus important encore, il le savait. Un assassin incapable de tenir debout ne servait plus à rien, il ne pouvait plus rien contre elle et s’il n’exécutait pas les ordres de la Reine, elle se débarrasserait de lui en lui faisait subir les pires atrocités. Il ne lui restait plus qu’une chose à faire, mourir en guerrier, l’arme à la main. Calypso posa sa main gauche sur le front de l’homme et pencha sa tête en arrière afin de dégager son cou. Elle glissa la lame de sa dague le long de sa gorge, puis, alors que l’assassin était à sa merci, se pencha et murmura à son oreille.

- Tu iras dire à ta Reine que si elle désire me tuer, il lui faudra m’envoyer de vrais assassins…

L’homme blêmit en comprenant ce que s’apprêtait à faire la jeune femme.

- Non ! Grogna-t-il. Tu ne peux pas me laisser en vie, tu dois me tuer, tu as gagné, j’ai perdu, tu dois m’achever !

Calypso dont le fil de son arme avait entaillé la chair de l’homme lorsqu’il avait commencé à parler, recula doucement et disparut dans la forêt, laissant le guerrier assassin hurler tout le mal que lui ferait sa Reine s’il rentrait sans avoir achevé sa mission.